8 femmes et une voûte céleste


Une brève histoire de l’Antiquité à aujourd’hui sur les observations menées par des femmes astronomes

Portrait de Margaret Bryan et ses deux filles tiré du livre “Compendious System of Astronomy” de Bryan, publié en 1797. Crédit: Wikipedia

1. Enheduanna, de Babylone

Il y a plus de 4400 ans, à Babylone en Mésopotamie — aujourd’hui l’Irak dans les environs de Bagdad, Enheduanna fut nommée “Grande prêtresse de la déesse de la Lune dans la ville” (High Priestess of the Moon goddess in the City), un rôle de haut prestige dans cette civilisation qui consistait, entres autres, à étudier le mouvement des corps célestes. Avec ses collègues de l’empire Akkadian, en collaboration avec les autres prêtes, elle avait établi un réseau d’observatoires pour mieux comprendre les étoiles. Les Babyloniens sont probablement les premiers à avoir créé un catalogue d’étoiles. Ils étudiaient les positions des planètes dans un cadre où les étoiles sont fixes, pensaient-ils, car elles semblent ne pas bouger.

À cette époque, les femmes avaient la chance de décrocher une position sociale élevée, ayant de l’autonomie et pouvant faire des activités commerciales, et même devenir juge.

En Grèce, environ 4000 ans après Enheduanna, les astronomes procédaient à des observations systématiques qui ont conduit aux premiers catalogues d’étoiles “modernes”, avec plus de 1000 étoiles. Les arabes ont ensuite perfectionné les instruments des Grecs et sont demeurés les plus justes pour plusieurs siècles. L’héritage des arabes est omniprésent encore aujourd’hui, tel que des noms d’étoiles, par exemple Aldebaran. Ils nous ont légué également une tonne de littérature sur l’astronomie.

Les étoiles sont fixes et utilisées pour la navigation, comme l’imaginaient les Égyptiens sur le fameux plafond astronomique dans la tombe de Senenmut (1473 BC). Crédit: Wikipedia

2. Sophie Brahe, du Danemark

À notre ère, il y a environ 450 ans, Sophie Brahe travaillait en collaboration avec son frère, le célèbre astronome Tycho Brahe, et ce, dès l’âge de 14 ans. Le duo passait les nuits à observer les étoiles et les jours à faire des calculs mathématiques. Durant une nuit de novembre 1572, la sœur et le frère ont observé une nouvelle étoile dans le ciel, dans la constellation de Cassiopé. Le phénomène a été visible pendant plus d’un an, période à laquelle ils ont investigué ce nouveau corps céleste. La luminosité de l’objet augmentait autant que le nombre de questions, car, comme se fait-il qu’une étoile bouge alors que les étoiles étaient supposées être fixes?

À l’époque de Sophie Brahe, Galilée n’avait pas encore inventé le télescope (juste en 1609). Mais grâce à l’ingéniosité des Brahes, ils avaient conçu un instrument qui leur a permis de publier un catalogue d’étoiles avec une grande précision. Sophie et Tycho étaient dans les premiers à suivre une méthodologie scientifique. Lorsque Johannes Kepler eut accès à leurs données, il fut en mesure de révolutionner la science avec ses trois lois sur le mouvement des planètes, suivi de la découverte de Isaac Newton et sa théorie de la gravité.

Johannes Hevelius et sa femme Elisabetha observant le ciel (1673). Crédit: Wikipedia

3. Elisabetha Koopman Hevelius, de Pologne

Elisabetha Koopman Hevelius travaillait également chaque jour, et ce, pendant des années, avec son mari Johannes Hevelius, il y a environ 350 ans. Ils ont légué à la science des milliers de calculs qui démontrent la position des étoiles avec leur longitude et latitude. Ce qui est le plus extraordinaire dans leur histoire, c’est qu’ils ont identifié la position exacte de plus de 1500 étoiles, et ce, à l’oeil nu.

4. Caroline Herschel, de l’Allemagne

En 1798, Caroline Herschel, il y a plus de 200 ans, a présenté à la Royal Society des corrections à un catalogue d’étoiles existant ainsi que l’ajout de plus de 500 nouvelles étoiles.

5. Margaret Bryan, de l’Angleterre

Pratiquement la même année, Margaret Bryan publiait un livre destiné à ses élèves du primaire contenant des leçons notamment sur l’astronomie, les lois de Newton, les orbites des planètes, les étoiles et l’Univers.

6. Marie-Jeanne de Lalande, de la France

Marie-Jeanne de Lalande publia quant à elle, les “Tables horaires pour la marine” dans les mêmes années, fruit de ses calculs documentés sur 300 pages et était utilisée pour déterminer le temps en mer grâce à l’altitude du Soleil et des étoiles. Le célèbre astronome Joseph-Jérôme Lalande écrivit à propos d’elle (traduit de l’anglais, p.160) :

« Je crois — écrit Lalande — que ce qui manque aux femmes, ce ne sont que les opportunités d’éducation et les exemples qu’elles peuvent imiter ; on les voit assez se démarquer, malgré les obstacles de l’éducation et des préjugés, pour croire qu’elles ont tout autant de talent que la plupart des hommes qui se font une réputation en Science.”

En 1801, elle avait collaboré au livre “Histoire céleste française” de Lalande, un catalogue d’étoiles de plus de 47 000 étoiles. Pour calculer leurs positions exactes, il faut savoir qu’il y avait trente-six opérations mathématiques par étoile.

7. Les femmes “ordinateurs” de Harvard aux États-Unis

“Pickering’s Harem”, ainsi appelé, pour le groupe de femmes ordinateurs de l’observatoire du Harvard College, qui travaillait pour l’astronome Edward Charles Pickering. Le groupe comprenait l’ordinateur et astronome de Harvard Henrietta Swan Leavitt (1868–1921), Annie Jump Cannon (1863–1941), Williamina Fleming (1857–1911) et Antonia Maury (1866–1952). Crédit: Harvard College Observatory

Dans les années 1890, il y a plus de 130 ans, un groupe de femmes travaillait à la Harvard College Observatory et était nommé les “ordinateurs de Harvard”. Grâce à de petites plaques de verre, 8X10, sur lesquelles des photos astronomiques avaient été prises avec un télescope durant la nuit tenaient plusieurs milliers d’étoiles. Patiemment et méthodiquement, les femmes ordinateurs calculaient à la main, la position de chaque étoile, mesuraient leur brillance relative, étudiaient leur changement en fonction du temps, déterminaient le matériel chimique de leur composition. Leur groupe était le première à réaliser que l’univers est en expansion.

Plaque de verre de la galaxie d’Andromède issue des archives des « ordinateurs » de l’observatoire de Harvard. Crédit: Harvard College Observatory

8. Cecilia Payne-Gaoschkin, de l’Angleterre et des États-Unis

En 1925, Cecilia Payne-Gaoschkin fut la première femme à obtenir un PhD et c’était à la Harvard University, mais une branche de l’université à l’époque dédiée seulement aux femmes. Dans sa thèse, elle démontrait que les étoiles étaient composées principalement d’hydrogène et d’hélium basé sur une démarche scientifique rigoureuse. Des gens de la communauté de l’époque n’étaient pas convaincus de ses résultats. Un autre homme est arrivé un peu plus tard avec les mêmes résultats et l’attribution de la découverte lui a été remise.


Depuis 1919, le catalogue accepté internationalement est publié par l’International Astronomical Union (IAU) qui compte environ 20 000 membres ayant un PHD ou plus, dont 20% de femmes. Les étoiles les plus brillantes portent un nom et les autres plutôt un code. Avec l’historique des recherches depuis des Lunes, les scientifiques gardent la correspondance entre les différents noms utilisés dans différents catalogues pour parler de la même étoile. Par exemple, Bételgeuse est aussi connue comme Alpha Orionis, HR 2061, BD +7 1055, HD 39801, SAO 113271, et PPM 149643. Voir la liste des noms d’étoiles 2021 par IAU.

Notre étoile à nous, c’est le Soleil qui fait partie de notre système solaire. Dans ce système, il n’y a donc pas d’autre étoile. C’est le corps céleste qui brille et qui nous fournit la vie. Les étoiles ne sont pas fixes, nous l’avons su basé sur l’observation des supernovae. Étant d’énormes nuages de gaz, les étoiles se forment avec la gravitation pour devenir une centrale nucléaire, où l’hydrogène est transformé en hélium. Le processus de fusion peut se dérouler sur des milliards d’années. Il y a des étoiles naines, des géantes et des supergéantes, des rouges, blanches, orangées, bleues, selon leur étape de leur vie et donne ainsi leur niveau de luminosité perçu de la Terre. Une blanche, par exemple, n’a plus de combustible à brûler. La voûte céleste qui entoure notre planète est cataloguée en 88 constellations.

Les plus belles étoiles

Par un petit matin d’été, près du 46e parallèle au Québec, j’observe la position des étoiles avec l’application Night Sky. Je pointe ma tablette vers le ciel — et même sous l’horizon, et je peux voir les objets célestes autour de nous.

Recherches d’étoiles avec l’application Night Sky. Crédit: AG

Betelgeuse est une étoile super géante rouge qui, selon les scientifiques, devrait bientôt exploser. Elle est située dans la constellation d’Orion, dans l’épaule du personnage qui représente le fils de Poséidon, dieu de la mer. De la Terre, nous voyons sa lumière 1300 ans après son émission. Rigel, une étoile géante bleue dans un système composé de 4 étoiles, est dans la même constellation, mais plus lumineuse que Bételgeuse. Elle est au genou d’Orion.

Si notre système solaire avait Sirius comme étoile, nous aurions 2 soleils. En effet, Sirius est un système binaire d’étoile: Sirius A et Sirius B. Sirius A est la plus lumineuse des deux étoiles et représente l’étoile la plus lumineuse dans notre ciel nocturne. Le système est tout près de notre soleil — seulement à 8.7 années-lumière. La plus proche étoile de notre étoile est Proxima Centuri et sa lumière arrive à nous en 4.22 années. C’est une petite étoile rouge visible seulement au travers d’un télescope et dans l’hémisphère Sud.

Notre étoile polaire, dans l’hémisphère Nord, est située sur l’axe de rotation de la Terre et facilement repérable, grâce à la célèbre constellation de la Petite Ourse. C’est le point de repère depuis des millénaires pour se repérer. Dans l’hémisphère Sud, il n’y a pas “d’étoile du Sud”, il est donc plus difficile de s’orienter grâce à une étoile “fixe”. Il y a 14 000 ans, Vega était notre étoile polaire! Elle le redeviendra dans plus de 10 000 ans. Vega est une étoile bleue, la 5e la plus lumineuse de notre ciel nocturne. Comparée à notre Soleil, Vega est presque 3 fois plus grosse et est à 25 années-lumière de notre étoile.

Conclusion

De l’Antiquité à aujourd’hui, les femmes et les hommes observent les étoiles, fascinés et avides de comprendre l’univers qui nous entoure. Notre estimation actuelle est sur des milliards et des milliards d’étoiles qui entourent notre système solaire, composé d’une étoile — le Soleil — mais nous savons que nous ne voyons pas encore très loin et que l’Univers est en constante expansion (et à l’infini). Pouvons-nous nous inspirer du fonctionnement des centrales nucléaires des étoiles pour créer de nouvelles technologies pour nos moteurs de fusée? Qu’allons-nous découvrir dans nos prochains voyages d’exploration ou grâce aux dernières technologies?


Référence

Histoires de Enheduanna, Sophie Brahe, Elisabetha Koopman-Hevelius, Caroline Herschel, Margaret Bryan, Marie-Jeanne de Lalande, l’histoire de l’astronomie en Mésopotamie, par les arabes, en Grèce et en Égypte tirées de: “The Unforgotten Sisters, Female Astronomers and Scientists before Caroline Herschel, by Gabriella Bernadi, Springer (2016)”

Curiosités extra-terrestres: observer au-delà de notre atmosphère


Les découvertes à propos de l’Univers grâce au télescope Hubble et sa mère, Dr Nancy Grace Roman, la première NASA’s Chief of Astronomy and Relativity.

Le Dr Nancy Grace Roman, première cheffe de l’astronomie à la NASA, explique l’Observatoire solaire en orbite avancée (AOSO) à l’astronaute Edwin “Buzz” Aldrin en 1965 à Washington, D.C. Crédit: NASA
Buzz était avec Neil Armstrong lors de nos premiers pas sur la Lune en 1969.

Depuis la nuit des temps, nous observons le ciel et ses étoiles pour comprendre d’où nous venons et vers où nous allons. Et le premier enjeu est exactement là: à part le soleil que nous voyons facilement en plein jour, nous sommes voilés par l’atmosphère et les nuages. Nos observations depuis la Terre sont, par définition, physiquement limitées.

Toutefois, étant courageux de travailler durant nos heures normales de sommeil, nous avons été en mesure de découvrir, il y a quelques centaines d’années, que nous vivons dans une galaxie et qu’il y a des planètes et de petits satellites dans notre système solaire, entre autres.

La question fut donc : comment pouvoir observer la galaxie et autres objets inconnus dans l’Univers, sans être gêné par la protection essentielle à notre survie que notre Terre nous offre? Ça prenait un télescope — un gros. Et directement aux premières loges: dans l’espace. En 1946, Splitzer, le père du télescope, publiait son idée comme quoi nous devrions nous doter d’un télescope et le placer au-delà de notre atmosphère. Durant les débuts de la NASA et de l’intérêt des Américains à compétitionner pour l’accès à l’Espace par rapport aux Soviétiques, dans les années 1960, il fallait convaincre les gens ayant le portefeuille de payer une somme astronomique et ainsi, faire avancer la science. Le gouvernement voulait envoyer quelqu’un sur la Lune, mais pourquoi un télescope, se demandaient-ils.

C’est une femme qui a relevé cet exploit. Grâce à sa détermination et son leadership, elle a franchi chaque étape nécessaire pour convaincre le Congrès, débloquer l’argent, réunir des ingénieurs et astronomes talentueux et bâtir le programme à partir de zéro pour faire naître ce qui allait devenir le meilleur télescope au monde.

Dr Nancy Grace Roman est la femme sur la photo à gauche du Président John F. Kennedy. C’était en 1962, lors de la remise du prix Federal Woman’s Award pour leurs contributions extraordinaires au gouvernement.

Dr Nancy Grace Roman à la gauche du Président Kennedy en 1962. Crédit: NASA

Elle est née en 1925 aux États-Unis à l’époque où ce n’était pas bien vu pour une femme de se consacrer aux études supérieures et à la science. Elle était inspirée de son père, un scientifique et de sa mère, qui l’amenait prendre de fabuleuses balades à regarder les constellations. Durant ses études, les encouragements étaient rares et pourtant, elle a persévéré — “Pourquoi une femme étudierait les mathématiques au lieu du Latin?”

Dr Roman fut la première femme ayant décroché un poste exécutif à la NASA et fut nommée Chief of Astronomy and Relativity. Elle est considérée comme la mère du télescope Hubble. Juste après la Deuxième Guerre mondiale, elle obtenait son doctorat de l’Université de Chicago. Elle a fait des découvertes notamment sur la composition des étoiles qui a mené à notre galaxie — la Voie Lactée — en plus de répondre à des questions fondamentales grâce aux ondes radio. Dans une de ses entrevues, elle se remémorait l’époque où elle devait s’assurer de toujours mettre les lettres “Dr” comme préfixe à son nom, sinon elle n’était pas prise au sérieux.

Elle était à la quête de percer les secrets de l’Univers et il fallait pour y arriver, de nouvelles méthodes. Les portes à l’exploration se sont ouvertes à un autre niveau: l’humanité a pu commencer à goûter à la valeur d’un télescope dans l’espace dans les années 90.

Les débuts de Hubble racontés par Dr Roman

Vidéo de la NASA (4 min 30)

Hubble at 25 — The Beginning, by NASA on YouTube

Les exploits de Hubble après 25 ans

Vidéo de la NASA (2 min 30)

Hubble: Voyage of Discovery by NASA on YouTube
2014 Hubble Image of the Pillars of Creation (“Piliers de la création”). Credit: NASA, ESA, and the Hubble Heritage Team (STScI/AURA)
Cat’s Eye Nebula (“Nébuleuse de l’oeil de chat”). Credits: NASA, ESA, and the Hubble Heritage Team (STScI/AURA)
The Sombrero Galaxy (“La Galaxie Sombrero”). Credit: NASA and The Hubble Heritage Team (STScI/AURA)
Ganymede Disappears Behind Jupiter (“Ganymède disparaît derrière Jupiter.”). Credit: NASA, ESA, and E. Karkoschka (University of Arizona)
L’astronaute F. Story Musgrave lors du déploiement de panneaux solaires sur Hubble. Remarquez le bras canadien! Crédit: NASA

Conclusion

Si nos plus vieux ancêtres, comme Homo Erectus, n’avaient pas été curieux de savoir qu’est-ce qu’il y avait l’autre côté de la montagne, nous n’aurions pas peuplé la planète et nous n’aurions pas la vie que nous avons actuellement. Cette force humaine est fascinante: le désir d’explorer. Ce mécanisme est déclenché par la passion et la persévérance et est généralement une résultante d’une nécessité. Dans le cas de nos ancêtres, ils allaient manquer de nourriture. Aujourd’hui, la science est si avancée que nous sommes à l’étape de chercher s’il y a de la vie ailleurs que sur Terre.

Avant 1990, c’était comme si nous observions notre quartier depuis l’intérieur de notre maison, ayant une idée de ce qui nous entoure à l’extérieur grâce à des instruments pouvant être utilisés que dans des conditions spécifiques. Aujourd’hui, tous les livres sur l’astronomie réfèrent aux observations faites par le télescope. Hubble nous a permis de mieux comprendre le cycle des étoiles, la naissance des galaxies, la composition de la matière et notre système solaire, entre autres. Nous sommes mieux équipés pour comprendre ce qui nous est arrivé, qu’est-ce qui peut nous arriver et comment pouvons-nous améliorer la qualité de nos vies, et ce, grâce à de nouvelles technologies.

Et ce n’est que le début.

La prochaine génération du télescope est en développement et portera le nom de Roman Space Telescope, en l’honneur à Dr Nancy Grace Roman pour le télescope Hubble. L’ère de l’exploration extra-terrestre atteindra un autre niveau extraordinaire.


Découvrez des albums photos de Hubble sur Flickr par la NASA.

L’observation du ciel: de l’invention du calendrier au iPhone

Calendrier pour l’agriculture, les étoiles pour la navigation, les temples du Soleil et les téléphones intelligents — l’humain n’a cessé d’innover grâce à l’observation du ciel

Galilée montrant au doge de Venise comment utiliser le télescope, Giuseppe Bertini (1858). Wikipédia

Les observations du ciel à travers les époques nous ont amenés à des inventions extraordinaires. Voici un top 4:

1. Le calendrier

Les peuples avaient besoin d’un outil pour mesurer le temps et planifier diverses activités notamment le soin de leurs terres agricoles en fonction des saisons. Aujourd’hui, il existe plusieurs types de calendriers, mais ils sont tous basés sur la même chose: les observations du ciel et les différents phénomènes naturels cycliques. Certains se fient à la Lune, d’autres au Soleil.

Un calendrier lunaire est basé sur les phases de la Lune pour déterminer le premier jour du mois. Les phases sont en fonction de la position relative du Soleil, de la Terre et de la Lune. L’année a donc 354 jours et les Fêtes n’arrivent pas à la même date d’année en année.

L’application Sky and Moon phases calendar permet de consulter les heures de lever et du coucher du Soleil et de la Lune, dans quel signe du zodiaque est la Lune et quand sera la prochaine nouvelle Lune. Crédit capture à partir d’un iPhone: AG.

Le calendrier le plus connu et utilisé au monde est le Grégorien datant de 1582 par le Pape Grégoire XIII. Celui-ci se base sur le Soleil et contient 365 jours. Noël arrive toujours le 25 décembre de chaque année.

2. Un système GPS naturel

Le Soleil ou la Lune nous permet donc de mesurer la cadence de nos vies. Les étoiles sont toutes aussi importantes. Nos ancêtres s’en servaient pour se repérer en nature. C’était leur GPS (Global Positioning System). De nos jours, ce sont les satellites qui nous transmettent l’information pour s’orienter.

Pour s’aider à mémoriser les étoiles et ainsi connaître leur position géographique sur Terre, l’espèce humaine a démontré une imagination fantastique. Nous avons regroupé des étoiles en constellations et tracé des silhouettes extraordinaires associées à des légendes. Ainsi, il était possible de transmettre le savoir de générations à générations en racontant des histoires.

Si la Lune exerce une influence significative sur la planète notamment pour les marées vu la force gravitationnelle, les gens se sont toujours demandé le rapport d’influence des astres sur nous-mêmes. C’est ainsi qu’est née l’astrologie il y a plus de 4000 ans. Étant donné qu’il n’y a pas de preuves scientifiques, la majorité des gens ne le prend pas au sérieux. Ceci dit, dans notre culture populaire, il n’est pas rare qu’on remarque la différence entre une personne, par exemple, de signe astrologique Poisson et une autre Taureau. En somme, douze constellations tracées par notre imagination formant un anneau de 360 degrés sur l’orbite terrestre représentent chaque signe du zodiaque. Les vieilles cartes de l’Univers démontrent régulièrement ces signes dans le ciel et servent toujours de guide.

Pour en savoir davantage sur l’histoire de l’astrologie, je recommande “La tentation de l’astrologie” (FR) / “The Secrets of the Vaulted Sky: Astrology and the Art of Prediction“ (EN), de David Berlinski.

Les signes astrologiques autour de nous. Crédit: Astronomytrek.

3. De l’ingénierie

Des civilisations malheureusement disparues nous ont fait l’immense honneur de nous léguer des sites extraordinaires dédiés, selon plusieurs archéologues et historiens, aux observations astronomiques. J’en ai visité deux: Stonehenge en Grande-Bretagne et le Machu Picchu au Pérou. Ces sites sont considérés aujourd’hui comme un héritage inestimable de nos ancêtres, un exploit d’ingénierie en plus d’être dotés d’un côté mystique et spirituel. On dit que les peuples anciens s’en servaient, entre autres, pour observer des phénomènes astronomiques, telles que les éclipses et la position du Soleil, notamment pour prévoir le solstice d’été et d’hiver.

Machu Picchu, par les Incas, XVe siècle. Crédit: AG (2011)
Stonehenge, probablement par les autochtones, il y a plus de 4500 ans. Crédit: AG (2009)

Visitez virtuellement et gratuitement Stonehenge grâce au site internet Skyscape. Commencez par cliquer en bas à droite sur le bouton “Skyscape” afin de voir la position des planètes et du soleil, entre autres. Ensuite, en haut de l’écran, cliquez sur les petits carrés qui représentent différentes heures de la journée. Comme dans un jeu vidéo, cliquez-glissez sur l’image pour observer aux alentours.

Capture d’écran du site Stonehenge Skyscape par English Heritage. Crédit capture: AG.

Mon séjour à Prague m’a inévitablement amené à contempler son horloge astronomique, un magnifique astrolabe médiéval créé en 1410. Elle indique notamment la position du Soleil et de la Lune ainsi que les signes astrologiques. En premier plan, aux couleurs bleue et orange, c’est la Terre et la lumière du Soleil. Le deuxième plan avec le zodiaque se déplace selon le temps. Construite plus de 100 ans avant la publication de Nicolas Copernic et le modèle héliocentrique (1543), l’horloge de Prague propose le modèle géocentrique, c’est-à-dire que la Terre est au centre de l’univers, comme le disait Ptolémée. Son système était accepté depuis 1400 ans.

Horloge astronomique de Prague, XIVe siècle. Crédit: AG (2008)

4. Des connaissances sur l’Univers accessibles à tout le monde

En 1609, Galilée avait inventé sa lunette pour observer le ciel et révolutionner nos connaissances. Aujourd’hui, la quasi-majorité de la population tient dans le fond de leur poche un petit ordinateur capable de les accompagner pour observer le ciel, et ce, grâce à une connexion Internet. Prenez, par exemple, la version gratuite de l’application Night Sky.

  • C’est le type d’outil “pointer-voyer”: de pointer le ciel et voir les objets célestes apparaître avec leurs informations. On voyage dans l’Univers depuis le confort de notre salon.
  • Zoomer pour voir encore plus loin dans les étoiles.
  • Rechercher des satellites, des étoiles, des planètes et laisser le soin à l’application de vous montrer où est actuellement cet objet dans l’Univers.
  • Profiter de la réalité augmentée pour observer les figures fantastiques dans le ciel qui permettait à nos ancêtres de s’orienter grâce aux étoiles.
  • Et pourquoi pas, faites de l’astrophotographie!
L’application Night Sky en action. Crédit capture à partir d’un iPad: AG.

Conclusion

L’observation du ciel a fertilisé notre imagination depuis la nuit des temps et nous a poussés à créer sur Terre des choses extraordinaires. Pour pouvoir mesurer le temps et prédire les prochaines saisons, nous avons inventé le calendrier. Basés sur la position des étoiles, nous avons imaginé des silhouettes fantastiques dans le ciel et les avons associées à des légendes. Les histoires racontées nous aidaient à nous bâtir mentalement une carte du ciel, ce qui nous permettait de nous géolocaliser en naviguant. Au fil des siècles, nous avons bâti des sites extraordinaires qui relèvent d’exploits d’ingénieries. Certains d’entre eux comportent des éléments spécifiques pour suivre l’Univers qui nous entoure et mesurer le temps grâce au Soleil. Finalement, l’accessibilité aux connaissances sur l’Univers est maintenant possible pour tous grâce à l’Internet et aux téléphones intelligents.


Autres références

La NASA célèbre les 50 ans du programme Apollo

Visite guidée sur le site de lancement historique des missions sur la Lune

Logo de la NASA à l’entrée du Kennedy Space Center, Floride. Crédit: Anne Gauthier

En arrivant au Kennedy Space Center, sur le site de la NASA à Cape Canaveral (Floride), vous allez embarquer dans un autobus privé qui vous conduira à un des musées d’art et d’ingénierie les plus iconiques de l’histoire de l’humanité. Grandeur nature.

Dans une salle sombre, soudain s’ouvriront des écrans d’une autre époque. Une lumière bleutée vous permettra de voir des dizaines de vieux ordinaires, soudés l’un à l’autre comme un énorme tableau de bord. Le président des États-Unis John F. Kennedy sera vivant sur l’écran central.

Reproduction de la salle de contrôle du programme Apollo, Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier

Vous allez revivre le lancement de la mission d’Apollo qui permit, en 1969, aux astronautes Neil Armstrong et Buzz Aldrin, de marcher sur la Lune. Ils seront les premiers sur 12 au total jusqu’en 1972.

Après ce voyage dans le temps, vous n’avez rien vu encore.

Vous serez invités à suivre un corridor qui vous amènera à un hangar. Et c’est à ce moment que vous allez réaliser l’exploit technologique nécessaire pour assouvir notre soif d’exploration extra-terrestre.

Elle repose là, accrochée à l’infrastructure. Le bleu du hangar vous rappelle le ciel. Le premier regard est éparpillé, car plusieurs couleurs vives attirent votre attention. En reprenant vos esprits, après quelques dizaines de secondes, vous remarquez les cinq moteurs F-1 de Rocketdyne pouvant produire 7.5 millions de livres de poussée. Ils sont juste au-dessus de votre tête. Chaque moteur mesure 19 X 12 pieds et pèse plus de 18 000 livres. Ils brûlent du kérosène et de l’oxygène liquide.

Votre cou est dans une posture perpendiculaire à vos corps et vous faites quelques pas sous l’énorme pièce. Vous réalisez maintenant que c’est la fusée Saturn V qui a rendu possible le programme Apollo. La fusée s’étend sur 363 pieds. C’est comme un immeuble de 36 étages sur l’horizontale flotte devant vos yeux.

Étape 1 de la fusée Saturn V et les cinq moteurs F-1. Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier

Ces moteurs ultra-puissants n’étaient que l’étape 1 de 3 dans l’ascension. En effet, pour amener les astronautes sur la Lune, il y a différentes étapes techniques à franchir et donc la fusée Saturn V a trois sections: les S-IC, S-II et S-IVB. Ces sections se détachent de la fusée à des moments précis. Chaque énorme compartiment tombera éventuellement dans l’océan Atlantique à différentes distances du site de lancement. Les équipes sur Terre tenteront de les retrouver, mais ils n’y parviendront pas toujours.

L’étape 1 se déclenche avec les cinq moteurs F-1 à feu. La fusée commence à peine à se soulever de la Terre. Selon les scientifiques, le bruit provoqué par le lancement d’Apollo est un des plus intenses jamais enregistrés, autant par l’humain que par la nature. Les vibrations se font ressentir à plusieurs kilomètres à la ronde. Cette étape est responsable d’amener la fusée à 61 kilomètres de la Terre, en 2.5 minutes. Les astronautes subissent une très grande force gravitationnelle qui les écrase dans leur capsule.

L’étape 2 possède cinq autres moteurs de modèle J-2. Ceux-ci brûlent de l’hydrogène liquide ainsi que de l’oxygène liquide. En 6 minutes, la fusée peut maintenant atteindre une altitude de 185 km avec une vitesse de plus de 24 000 km/h.

Étape 2 de la fusée Saturn V et les cinq moteurs J-2. Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier

Finalement, l’étape 3 est divisée en deux temps et elle possède un seul moteur J-2. L’objectif est d’amener la fusée en orbite terrestre basse. À ce moment, le vaisseau spatial est toujours attaché à l’étape 3 (S-IVB) et ils éteignent le moteur. Les astronautes tournent autour de la Terre le temps de vérifier si les systèmes sont bien fonctionnels avant de partir vers la Lune. Quand tout est prêt, ils déclenchent le Trans Lunar Injection qui permet de redémarrer le moteur, et fuir la gravité terrestre collante à plus de 38 000 km/h.

Étape 3 de la fusée Saturn V et le moteur J-2. Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier

Accroché à l’étape 3 de Saturn V, il y a les ordinateurs dans l’Instrument Unit. Cette bague gigantesque est extraordinaire pour l’époque. C’est la compagnie International Business Machines (IBM) qui a conçu cette portion avec les plans de conception des ingénieurs de la NASA. Le cerveau de la fusée a 21 pieds de diamètre et pèse approximativement 4 000 livres. Grâce aux calculs, l’unité permettait de déterminer quand allumer les moteurs, mesurer l’altitude, l’accélération, la vélocité, la position, l’état de santé des moteurs et plus encore.

Instrument Unit (les ordinateurs) de la fusée Saturn V. Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier

Le voyage n’est pas encore terminé. Le Command and Service Module (CSM) se sépare de l’étape 3. Le pilote doit conduire Columbia vers le module lunaire Eagle. Finalement, “The Eagle has landed…” Les astronautes sont arrivés sur la Lune.

Module lunaire Eagle. Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier
Vue de la fusée Saturn V dans son ensemble incluant le vaisseau spatial plus bas. Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier

La fusée Saturn V fut assemblée dans l’iconique bâtisse nommée VAB (Vehicle Assembly Building). Il y a 4 portes comme un garage, chacune faisant 456 pieds. Il faut compter 45 minutes pour les ouvrir ou les fermer.

Bâtisse (VAB) où la fusée Saturn V fut assemblée. À gauche, une tour ombilicale. Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier

La fusée Saturn V est ensuite transportée sur un transporteur à chenilles colossal, pesant 6 millions de tonnes, du VAB au site de lancement. Le parcours dure toute la journée tellement il doit se déplacer lentement pour éviter toute catastrophe.

Crawler. Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier

À l’époque du programme d’Apollo, le contexte politique était différent d’aujourd’hui. C’était la guerre froide avec l’Union soviétique. Youri Gagarine, un Soviétique, fut le premier homme dans l’espace, et ce, en 1961. Kennedy avait donné la décennie (#délaitrèscourt) pour que les Américains reprennent la première place dans la course vers la Lune.

Quelques années après les succès d’Apollo, le programme fut dissous par manque d’argent. Les politiques avaient changé, les priorités du budget aussi. La NASA proposait de grands programmes, comme aller sur Mars, mais le Congrès n’était pas convaincu.

Aujourd’hui, des compagnies privées de milliardaires prennent position. Dont SpaceX avec Elon Musk. Le modèle d’affaires a donc changé: ce n’est plus gouvernemental seulement, mais un partenariat avec le privé. De toute façon, la NASA ne pouvait plus fournir seule les sommes astronomiques pour rendre possibles les missions de recherche et d’exploration.

SpaceX d’Elon Musk sur le site de la NASA. Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier

Excellente nouvelle: la NASA a dernièrement annoncé un nouveau programme: Artemis — la sœur jumelle d’Apollo. Grâce à l’association de la NASA avec plusieurs agences spatiales internationales, dont le Canada, et un partenariat avec des compagnies privées, Artemis va repousser des humains sur la Lune. Dont une femme.

L’objectif de rester sur la Lune et l’utiliser comme étape pour aller vers Mars.


Autres références