Une femme marchera sur la Lune vers 2024

La Pleine Lune du 19 novembre 2021, à 18h. Joliette, Québec. Canon 6D Mark II, télescope Sky-Watcher Evostar 72ED, ISO 250, 1/320 seconde. Avec traitement Lightroom. Crédit: Anne Gauthier

Monochrome. Paysage accidenté. Cratères. Régions sombres, traînées lumineuses. Cercles. Milieu inhospitalier. Vide. Froid. Mystérieuse. Magnifique. Ce sont les mots qui me défilaient à l’esprit en prenant la photo de la Pleine Lune en novembre 2021 de mon jardin, chez moi.

La Lune est familière dans nos vies de Terriens, mais réussit constamment à nous étonner. Quand je l’observe, plusieurs sujets me viennent en tête. À quelle distance sommes-nous de la Lune? De quoi est-elle faite? Qu’est-ce qu’on voit? Qu’y a-t-il de l’autre côté non visible? À quoi ressemblerait la vie sur la Lune? Comment avons-nous fait pour nous rendre sur la Lune avec les programmes Apollo de la NASA? Mais surtout, je veux en savoir davantage sur le programme Artemis qui fera marcher la première femme sur notre satellite en plus de pousser encore plus loin nos connaissances.

Résultats d’une recherche sur la Lune grâce à une seule photo.

Liste d’observations à partir de la Terre

La nuit est noire.

La pollution lumineuse nous voile les yeux en régions urbaines. Ensuite, “… parce que la vitesse de la lumière est finie” et que l’Univers a une date de naissance [1 p.51-53] Les étoiles sont si lointaines, distribuées de façon non uniforme, et dans un Univers en constante expansion (et à l’infini), que leur lumière ne parvient pas jusqu’à nous. [1 p.32] Sachant que la lumière voyage à 300 000 km par seconde, en observant le ciel nocturne, nous regardons vers le passé. La lumière que nous percevons est issue d’un événement à un moment déterminé et ensuite sa lumière arrive à nous. Par exemple, étant donné que la distance entre la Lune et la Terre est d’un peu plus de 300 000 km, une lumière partant de la Terre mettra approximativement 1 seconde pour arriver à la Lune. Comparé au Soleil, la lumière prendra 8 minutes pour voyager entre les deux astres. [1 p.32] Je ne perçois donc plus le noir autour de la Lune et dans la voûte céleste comme une absence d’objet à observer, mais bien un élément à part entière.

Vue de la Terre à bord d’Apollo 11 (1969) pendant son voyage vers la Lune. Un astre de toute beauté, parmi des milliards d’autres. Crédit: NASA.

La Lune est illuminée.

C’est le Soleil qui l’éclaire. La Lune est visible autant de jour que de nuit, car elle tourne en orbite autour de la Terre. Son orbite n’est pas un cercle parfait, mais plutôt une ellipse dont la plus petite distance est de 356 000 km et la plus grande 407 000 km. [3 p.74] Elle est donc parfois “proche” de la Terre et à d’autres moments, plus loin.  D’où pourquoi nous observons différentes largeurs dans son diamètre. C’est l’attraction universelle, la gravité, qui attire et crée la satellisation de la Lune autour de la Terre. [3 p.84] 

La Lune serait un morceau de la Terre.

La Lune a 4.6 milliards d’années [2 p.13] et sa naissance fut violente. Un morceau de notre planète Terre s’est arraché dû à une énorme collision avec un objet de la taille de Mars, pour devenir une petite boule en orbite autour de nous. D’énormes météorites se sont ensuite fracassés sur la surface de la Lune, créant ainsi les cratères que nous pouvons observer encore aujourd’hui. 

Vue d’une partie de la Lune et de ses cratères à bord d’Apollo 8 (1968). Crédit: NASA.

Les chemins droits lumineux et éblouissants sont des “éclaboussures de roches pulvérisées et fondues projetées” des cratères. [2 p.13] Ensuite, durant son histoire, il y eut d’intenses éruptions volcaniques et ont formé les “mers” ou les grandes zones sombres. Étant donné qu’il n’y a pas d’atmosphère sur la Lune [2 p.10] protégeant ainsi sa surface, l’éclairage du Soleil définit donc clairement les formes. Soit c’est éclairé, soit c’est l’obscurité totale. Finalement, le sol lunaire est couvert d’une poussière nommée “régolite”. [5 p.17]

“Falcon”, le module lunaire Apollo 15 (1971) posé sur la régolite, la poussière lunaire. Crédit: NASA.

On sait ce qu’il y a sur la face cachée.

La Lune fait une rotation autour de la Terre d’une durée d’environ un mois, mais ne tourne pas sur elle-même. Nous voyons donc toujours le même côté de la Lune. L’autre côté est très différent. Il y a beaucoup moins de mers, étant donné que sa surface est plus épaisse que le côté visible: il y a eu moins d’éruptions volcaniques suite aux impacts avec les météorites. [5 p.58]

“Luna 3”  du programme russe en 1959 nous fait voir pour la première fois l’autre côté de la Lune. Crédit: Union of Soviet Socialist Republics sur le site de la NASA.

Les Chinois sont les premiers à alunir sur la face cachée de la Lune avec Chang’e 4 (nom d’une déesse chinoise de la Lune). C’était le 3 janvier 2019.

Crédit: TechInsider.

Nous connaissons autant la surface de la Lune que celle de la Terre.

Tout est catalogué: cratères, mers, montagnes… et depuis longtemps. Cependant, pendant des siècles, nous ne savions pas ce qu’il y avait sur la face cachée, comme le démontre cette carte ancienne:

Tabula Selenographica (cartographie lunaire) 1742. Crédit: Wikimedia Commons by Geographicus Rare Antique Maps.

Cette splendide illustration propose une comparaison entre la map de la Lune par Johannes Hevelius en 1647 (à gauche) et celle de Giovanni Battista Riccioli en 1651 (à droite). Hevelius nommait des points géographiques sur la Lune comme ceux qu’il connaissait sur la Terre, tel que “Sicilia” en Italie. Nous utilisons encore de nos jours plutôt les termes de Riccioli, comme “Sea of Tranquility” où Apollo 11 a aluni en 1969. Les différentes phases de la Lune sont également illustrées. Tout cela fut, en grande partie, possible grâce à l’invention de la lunette de Galilée pour observer les astres en 1609.

En observant la Lune, il est possible d’identifier les sites d’alunissage des missions Apollo, les mers et les cratères:

Carte d’alunissage des six missions d’Apollo. Crédit: NASA.

Une carte proposée par la NASA pour la journée internationale de la nuit d’observation de la Lune en octobre 2021. Les mers, les sites d’alunissage d’Apollo et des formes lunaires intéressantes à observer avec un télescope. Crédit: NASA.

Et si on observait la Terre avec les pieds sur la Lune

Florence Messineo, professeure de sciences physiques au lycée Henri IV (Paris) a écrit plusieurs livres, dont “Promenade sur la lune”. [3] Elle nous permet de nous imaginer qu’on marche sur la Lune et qu’on observe la Terre de loin. Voici un top 10 des points fascinants.

Apollo 17 (1972) sur la Lune avec vue sur Terre. Crédit: NASA.
  1. Difficile de déduire les distances dans un paysage monochrome aux contours extrêmement nets, partout. Sur Terre, grâce à l’atmosphère et aux couleurs, il est plus “facile” pour un humain de mesurer les distances, selon les différents plans visuels. [3 p.52]
  2. Les boussoles ne sont d’aucune utilité pour se repérer, car il y a peu de champ magnétique. La durée des journées est différente que sur Terre, donc on ne peut pas se fier qu’à midi le Soleil pointe vers le sud. [3 p.58]
  3. Pour qu’une onde sonore puisse se propager, il faut de la matière. Sur Terre, on entend par l’air, l’eau, même l’acier. Sur la Lune cependant, il n’y a pas d’atmosphère et la poussière est très absorbante. On n’entend rien. [3 p.67]
  4. La durée d’une journée sur la Lune équivaut à 29.5 jours terrestres: 15 jours de jour et 15 jours de nuit. [3 p.91]
  5. Il n’y a pas de saison sur la Lune. On définit une saison par la durée des jours. Sur la Lune, les jours sont sensiblement toujours de la même durée, et donc en équinoxe à longueur d’année. [3 p.95]
  6. Un observateur positionné sur la face cachée de la Lune ne verra jamais la Terre. [3 p.105]
  7. Durant un mois lunaire (29.5 jours), l’observateur verra les phases de la Terre comme nous voyons les huit phases de la Lune, incluant la pleine Terre. [3 p.109] “Quand c’est la pleine Lune sur la Terre, c’est la nouvelle Terre sur la Lune, quand c’est la pleine Terre sur la Lune, c’est la nouvelle Lune sur la Terre.” [3 p.111]
  8. Il n’y a pas de “lever et coucher de la Terre” sur la Lune. [3 p.111] La Terre semble immobile dans le ciel de la Lune et les phases de la Terre apparaissent successivement. [3 p.112]
  9. Le “clair de Terre” est “environ cinquante fois plus lumineux que le clair de (pleine) Lune.” Notre planète a un plus grand diamètre et en plus, est en couleurs dans un ciel noir. [3 p.121] 
  10. On voit la planète Terre tourner sur elle-même. Il est donc possible de reconnaître les continents, les océans, les pôles… [3 p.121]

Bonus: 

  • Étant donné qu’il n’y a pas d’atmosphère, on peut mieux distinguer les couleurs des étoiles. [3 p.131]
  • Nous ne pouvons identifier les mêmes constellations que nous avons nommées sur Terre, car nous n’observons pas du même angle. [3 p.131]
  • On voit le Soleil comme un disque blanc. [3 p.89]
Un astronaute d’Apollo 12 (1969) et le Soleil, un grand disque blanc éblouissant. Crédit: NASA.

Les voyages d’Apollo sur la Lune grâce à la collaboration avec des femmes scientifiques

Le nom du programme de la NASA vient du dieu grec du Soleil: Apollo. [5 p.60] Entre 1964 et 1976, on a posé les pieds sur la Lune six fois. [2 p.13] Au total, douze hommes auront fait cet exploit incroyable. 

L’astronaute David Scott à bord d’Apollo 9 (1969) regardant la Terre. Crédit: NASA.

Les astronautes ont le même réflexe que les voyageurs à bord d’un avion: prendre une photo du hublot. Dans le cas ici d’Apollo 10 (1969), on voit le module lunaire revenir au module de commande et de service après sa mission. Crédit: NASA.

Plusieurs femmes ont collaboré depuis la Terre au succès d’Apollo sur la Lune. De nombreux domaines d’expertise étaient nécessaires, dont une nouveauté: l’informatique. Margaret Hamilton et son équipe ont développé le logiciel qui a permis aux missions d’Apollo de marquer l’Histoire. Sa force fut notamment d’insister à procéder à de robustes tests afin de prévoir les erreurs et éviter l’inévitable. 

Margareth Hamilton, la femme qui a inventé le terme “génie logiciel” (software engineering), photographiée devant le code source du système embarqué d’Apollo. Crédit: NASA.

JoAnn Morgan était ingénieure (Measurement and Instrumentation Engineer and a Data Systems Engineer) [9] et fut la seule femme dans la salle de contrôle lors de l’envol d’Apollo 11. Elle avait fait ce choix de carrière, dans les années 60, car elle était dans une quête insatiable de nouvelles connaissances et d’exploration. [9]

JoAnn Morgan était la seule femme présente dans la salle de lancement, lors de la mission Apollo 11 (1969). Crédit: Le Parisien – NASA.

Nouveau programme Artemis de la NASA: Une femme marchera sur la Lune vers 2024

Artemis est le nom de la sœur jumelle du dieu grec du Soleil Apollo. Elle est également une déesse, mais plutôt associée à la Lune. Le programme qui succède à Apollo est présenté avec de la diversité dans toutes les équipes.

L’astronaute Christina H Koch en route vers l’International Space Station (ISS). Crédit: Christina H Koch – NASA.

Vidéo de la NASA expliquant pourquoi nous retournons sur la Lune et comment :

Crédit: NASA.

Conclusion

Une recherche fascinante grâce à une seule photo de la pleine Lune prise dans mon jardin.

Vidéo de National Geographic présentant une magnifique synthèse sur le sujet de notre satellite naturel:

Crédit: National Geographic.

Références

[1] Alimi, Jean-Michel. Pourquoi la nuit est-elle noire? [Paris] : Le Pommier, 2002. 
[2] Kitt, Michael T. La Lune : un guide d’observation pour l’astronome amateur. La Prairie : Broquet, c1994.
[3] Messineo, Florence. Promenade sur la Lune. Paris : Ellipses, c2008. 
[4] Lacroux, Jean. Découvrir la Lune. Paris : Larousse, 2005.
[5] Le Grand guide de l’astronomie 5e éd. GLENAT, 2020.
[6] Photos d’archive des programmes Apollo sur Flickr, NASA.
[7] NASA: Remember the Women Who Made #Apollo50th Possible
[8] Le Parisien: Apollo 11 : le «petit pas pour l’homme» n’aurait pas eu lieu sans ces femmes
[9] NASA: Rocket Fuel in Her Blood: The Story of JoAnn Morgan

Objectif: Photographier la Voie lactée avec le Sky-Watcher Star Adventurer 2i


La Voie lactée, photographiée à St-Michel-des-Saints en septembre 2021. Canon 6D Mark II sur la monture équatoriale Sky-Watcher Star Adventurer 2i, 14–24 mm à 14mm, ISO 500 f / 2.8 : 4 images superposées avec un total de 14 minutes d’exposition. Crédit: Anne Gauthier


C’est la première fois que je fais de l’astrophotographie. Je me suis planifié une session sur cinq nuits afin d’avoir le temps d’apprendre la technique et maximiser mes chances d’avoir une bonne météo.

Destination: St-Michel-des-Saints, dans le nord de Lanaudière au Québec.

Dans cet article, je décris comment j’y suis arrivée avec des photos en exemple pour démontrer chaque étape d’apprentissage. J’ai également mis les liens de certains tutoriels que j’ai visionnés.

Que voyons-nous exactement?

Représentation artistique de la Voie lactée et de ses bras. Crédits: NASA/JPL-Caltech/R. Hurt (SSC/Caltech)

Ce qu’on voit est en fait une portion d’un bras de notre galaxie, un mixte de gaz et de poussières. Avec l’application Solar Walk 2, je me suis baladée dans notre système solaire pour visualiser le phénomène. En voici un extrait:

Une balade dans notre galaxie avec Solar Walk 2 pour visualiser ce qu’on voit de la Voie lactée depuis la Terre. Crédit: Anne Gauthier

La préparation à l’astrophotographie

Équipements:

  • Trépied Manfrotto
  • Boîtier Canon 6D Mark II
  • Lentille Sigma 14-24mm F2.8
  • Star Adventurer 2i : monture équatoriale qui permet de suivre la rotation de la Terre pendant la prise de photos à longue exposition. Voir la vidéo YouTube de Peter Zelinka “Basic Overview“.
  • La saison pour voir la Voie lactée au Canada est entre février et septembre. Durant l’été, on la verra à l’horizontale et vers septembre, elle est à la verticale.
  • La phase de la lune est importante. En nouvelle Lune c’est idéal, car elle n’éclaire pas le ciel. J’ai consulté le calendrier lunaire avec l’application The Moon: Calendar Moon Phases. Ma session était du 5 au 9 septembre.
Un calendrier lunaire pour planifier une session d’astrophoto de la Voie lactée idéalement sans la lune. The Moon: Calendar Moon Phases
  • À St-Michel-des-Saints, le taux de pollution lumineuse est relativement bas, comparé à Montréal où on ne voit pas la Voie lactée. Consulter le site LightPollutionMap
Une carte de la pollution lumineuse selon la position géographique. Idéalement, le plus bas possible. LightPollutionMap
  • Vérification régulière de la météo de nuit avec le radar (MétéoMédia).
  • Vérification du pourcentage de couverture de nuages durant les heures de la nuit (TaMétéo). Idéalement en bas de 20%.
Vérifier régulièrement la couverture de nuages durant la nuit (idéal: moins de 20%). TaMétéo
  • Savoir le moment où les objets célestes intéressants passeront dans le ciel en utilisant l’application Night Sky. Configurer une date précise et voir en accéléré le mouvement des objets célestes durant la nuit. Stellarium est aussi très intéressant. Un aperçu:
Visualisation du passage des objets célestes selon la date et l’heure avec Night Sky.

La courbe d’apprentissage est abrupte

Le problème en étudiant la technique durant le jour, dans son salon, c’est qu’on ne voit pas d’étoiles, donc cette étape préliminaire est faite aveuglément, mais est tout de même nécessaire. Ça se corse quand on démarre notre session en pleine noirceur. Le froid, la fatigue et l’environnement nocturne peuvent affecter notre patience. En astrophoto, il faut rester calme et surtout travailler lentement et doucement: briser l’équipement parce qu’on ne voit rien serait bien dommage.

J’ai passé des heures sur YouTube. J’ai bien aimé entre autres Peter Zelinka et AstroExploring. J’ai commencé par monter mon boîtier 6D Mark II avec une lentille 14–24 mm afin de comprendre comment faire l’alignement polaire, sans quoi, les étoiles ressemblent à des virgules sur une photo de plus de 30 secondes. Il faut être très précis.

La nuit, durant une session, si quelque chose n’allait pas, je revenais à l’étape 1, car tout est fragile en faisant une photo de longue exposition. Si le trépied n’est pas à niveau, si l’équipement n’est pas balancé, si l’alignement polaire est désaligné, et un paquet d’autres facteurs: le résultat ne sera pas satisfaisant.

Étape 1: Trépied à niveau, boîtier + lentille 14–24 mm, maximum 25 secondes d’exposition

Tout est manuel: le focus de la lentille et les configurations de la caméra. J’ai mis à off les paramètres automatiques du boîtier pour éviter tous traitements de la caméra qui pourraient la faire bouger ou qu’elle essaie d’améliorer une photo noire. En mode Bulb, j’ai également désactivé la fonctionnalité “mirror lockup” pour bloquer le miroir et ainsi éviter une vibration.

Photo 1: nuit 1 / 5 à minuit. 20 secondes.

Photo 1: nuit 1 / 5 à minuit. Canon 6D Mark II, 14–24 mm à 14mm, ISO 4000 f / 2.8 20 secondes. Avec traitement Lightroom minimal. Crédit: Anne Gauthier

Deuxième photo: f/2.8, ISO 40 000. À un ISO si élevé, ce n’est que pour voir ce que mes yeux ne voient pas et ajuster la composition de mon image. L’émerveillement monte d’un cran: c’est la première fois que je voyais la galaxie Andromède (la petite soucoupe milieu vers la droite sur la photo ci-dessous).

Photo 2: nuit 1 / 5 à minuit. 15 secondes.

Photo 2: nuit 1 / 5 à minuit. Canon 6D Mark II, 14–24 mm à 14mm, ISO 40 000 f / 2.8 15 secondes. Aucun traitement Lightroom. Crédit: Anne Gauthier

Je positionne la lentille pour améliorer la composition et je fais plusieurs tests. La nuit continue de s’installer, les sons de la nature deviennent de plus en plus étranges. J’avais le “vertige inversé”: une impression que les arbres allaient me tomber dessus. Des nuages s’installent aussi par moment. J’ai dû reporter une session à la nuit suivante… la météo change vite. Après chaque test, je vérifie dans mon écran en zoomant dans la photo pour voir la qualité de l’image: est-ce flou? Trop clair? Trop noir? J’ajuste.

Une fois une certaine satisfaction atteinte, toujours à f/2.8, j’ai diminué l’ISO à 800 et réglé l’appareil pour être déclenché à intervalle de 3 secondes et prendre 10 photos. J’ai mis un retardateur de 2 secondes pour éviter que le déclenchement ne fasse pas bouger l’appareil. Chaque matin, je téléchargeais mes photos dans Lightroom et je fusionnais une série de photos pour en créer une seule. Il y a des séries que j’ai prises que je pensais bonnes en regardant dans l’écran de la caméra, mais depuis l’ordinateur, malheureusement non. Il faut faire beaucoup de tests.

Étape 2: Trépied + Star Adventurer 2i + 14–24 mm avec plus de 2 minutes d’exposition

La technique se corse à l’étape de l’alignement polaire (Polar Alignment) avec le Star Adventurer 2i. En plein jour, j’avais fait du repérage pour identifier quelques points de vue où je pourrais installer mon équipement pour que l’étoile Polaire soit dans mon champ de vision.

L’alignement polaire permet au Star Adventurer 2i, un petit moteur, de tourner au rythme de l’objet céleste sélectionné (étoiles, Lune ou Soleil) en fonction de la rotation de la Terre. Sur une longue exposition, la monture équatoriale nous permet d’avoir des étoiles claires et nettes sur nos photos.

Photo 3: nuit 3 / 5 à 2am. 5 minutes

Dans le coin droit en haut, c’est l’axe de rotation. Mon alignement polaire n’était pas bon, donc j’ai des traînées d’étoiles sur une photo de 5 minutes.

Photo 3: nuit 3 / 5 à 2am. Canon 6D Mark II, 14–24 mm à 14mm, ISO 800 f / 2.8 297 secondes (≈5 min). Avec traitement Lightroom. Crédit: Anne Gauthier

Pour arriver à faire correctement l’alignement polaire, il faut trouver l’étoile Polaire (Polaris). Une application sur le téléphone aide aussi pour s’orienter, mais il faut la voir de ses yeux pour pouvoir ajuster correctement le Star Adventurer 2i.

Repérer l’étoile Polaire. Crédit: NASA

Les étapes à suivre:

  • Configurer la latitude (St-Michel-des-Saints = 46e parallèle)
  • Ajuster le Star Adventurer 2i pour aligner précisément l’étoile Polaire selon l’année, la date et l’heure. J’utilise l’application SA Console. Le petit point gris est l’endroit exact pour positionner l’étoile Polaire dans le viseur.
SA Console: pour positionner exactement l’étoile Polaire selon l’heure exacte de la session photo (Polar Alignment).

Positionner la lentille vers la Voie lactée et balancer l’équipement sur le Star Adventurer 2i.

J’ai utilisé un câble entre mon boîtier et le Star Adventurer 2i pour que celui-ci déclenche la photo avec le temps d’exposition par défaut (120 secondes environ). J’ai aussi utilisé le mode Bulb avec une minuterie réglée à 5 minutes et un retardateur de 2 secondes. Malheureusement, le mode Wi-Fi ne fonctionnait pas sur le Star Adventurer 2i, car j’aurais pu le contrôler par l’application SA Console. Un intervalomètre est cependant idéal si la fonction n’est pas disponible directement dans le boîtier.

Vérifier l’alignement polaire au moindre mouvement de l’équipement.

Photo 4: nuit 3 / 5 à minuit. 15 secondes.

Mon boîtier a roulé sur le Star Adventurer 2i, car il n’était pas bien fixé.

Photo 4: nuit 3 / 5 à minuit. Canon 6D Mark II, 14–24 mm à 15mm, ISO 10 000 f / 2.8 15 secondes. Avec traitement Lightroom minimum et monochrome. Crédit: Anne Gauthier

Photo 5: nuit 4 / 5 à 11pm. 3 images superposées, total de 260 secondes (≈4 min).

Beaucoup de bruit dans l’image et de pollution lumineuse (lumière de sécurité du garage qui a allumé), passage de nuages et j’aurai dû prendre une photo des arbres en premier plan.

Photo 5: nuit 4 / 5 à 11pm. Canon 6D Mark II, 14–24 mm à 15mm, ISO 2000 f / 2.8 : 3 images superposées total de 260 secondes (≈4 min). Avec traitement Lightroom. Crédit: Anne Gauthier

Photo 6: nuit 4 / 5 à 2.30am. 25 secondes.

Découragée, j’ai décroché de la Voie lactée pour profiter du lac et du ciel étoilé. À noter qu’il était 2.30 du matin. De mon point de vue, il faisait très noir, mais ma caméra a capté des nuances d’orange.

Photo 6: nuit 4 / 5 à 2.30am. Canon 6D Mark II, 14–24 mm à 15mm, ISO 2500 f / 2.8 25 secondes. Avec traitement Lightroom. Crédit: Anne Gauthier

À ma 5e nuit, j’ai réussi mon défi: photographier la Voie lactée sans traînée d’étoiles. Après cette série de photos (seulement de 4), les nuages sont revenus ce qui a mis fin à ma session de cinq nuits d’astrophoto.

Je suis allée consulter des tutoriels sur Lightroom pour faire de la post-production sur la fusion de mes quatre images de la Voie lactée.

Photo 7: nuit 5 / 5 à minuit. 4 images superposées, total de 14 minutes d’exposition.

Photo 7: nuit 5 / 5 à minuit. Canon 6D Mark II, 14–24 mm à 14mm, ISO 500 f / 2.8 : 4 images superposées avec un total de 14 minutes d’exposition. Avec traitement Lightroom. Crédit: Anne Gauthier

Gros plan sur Andromède:

Cette galaxie est sensiblement de la même taille que la nôtre et elle est notre voisine. Elle fait aussi partie du Groupe Local, composé d’une quarantaine de galaxies. Selon les mesures cosmiques, Andromède n’est qu’à 2.5 millions d’années-lumière de nous. N’est-ce donc pas fascinant de capter cette chose avec son appareil photo?

Andromède, la galaxie voisine de la Voie lactée. Crédit: Anne Gauthier

Une des photos de la série utilisée pour la photo finale (240 secondes), sans traitement Lightroom:

Une des photos de la série (240 secondes), sans traitement Lightroom. Crédit: Anne Gauthier

Étape 3: Star Adventurer 2i + télescope Evostar 72ED + intervalomètre + une centaine de photos ayant un total d’une heure d’exposition

La prochaine étape: apprendre à travailler avec le télescope Evostar 72ED monté sur mon boîtier. J’ai testé avec une photo, à 1am, nuit 5 sur 5 et je me suis dit que j’avais encore beaucoup à apprendre!

Photo 8: nuit 5 / 5 à 1am. Canon 6D Mark II, télescope Evostar 72ED, ISO 6400 240 secondes. Traitement Lightroom minimal pour rire de soi-même. Crédit: Anne Gauthier

Conclusion

En résumé, voici l’endroit où j’ai pris les photos de la Voie lactée:

Crédit: NASA

8 femmes et une voûte céleste


Une brève histoire de l’Antiquité à aujourd’hui sur les observations menées par des femmes astronomes

Portrait de Margaret Bryan et ses deux filles tiré du livre “Compendious System of Astronomy” de Bryan, publié en 1797. Crédit: Wikipedia

1. Enheduanna, de Babylone

Il y a plus de 4400 ans, à Babylone en Mésopotamie — aujourd’hui l’Irak dans les environs de Bagdad, Enheduanna fut nommée “Grande prêtresse de la déesse de la Lune dans la ville” (High Priestess of the Moon goddess in the City), un rôle de haut prestige dans cette civilisation qui consistait, entres autres, à étudier le mouvement des corps célestes. Avec ses collègues de l’empire Akkadian, en collaboration avec les autres prêtes, elle avait établi un réseau d’observatoires pour mieux comprendre les étoiles. Les Babyloniens sont probablement les premiers à avoir créé un catalogue d’étoiles. Ils étudiaient les positions des planètes dans un cadre où les étoiles sont fixes, pensaient-ils, car elles semblent ne pas bouger.

À cette époque, les femmes avaient la chance de décrocher une position sociale élevée, ayant de l’autonomie et pouvant faire des activités commerciales, et même devenir juge.

En Grèce, environ 4000 ans après Enheduanna, les astronomes procédaient à des observations systématiques qui ont conduit aux premiers catalogues d’étoiles “modernes”, avec plus de 1000 étoiles. Les arabes ont ensuite perfectionné les instruments des Grecs et sont demeurés les plus justes pour plusieurs siècles. L’héritage des arabes est omniprésent encore aujourd’hui, tel que des noms d’étoiles, par exemple Aldebaran. Ils nous ont légué également une tonne de littérature sur l’astronomie.

Les étoiles sont fixes et utilisées pour la navigation, comme l’imaginaient les Égyptiens sur le fameux plafond astronomique dans la tombe de Senenmut (1473 BC). Crédit: Wikipedia

2. Sophie Brahe, du Danemark

À notre ère, il y a environ 450 ans, Sophie Brahe travaillait en collaboration avec son frère, le célèbre astronome Tycho Brahe, et ce, dès l’âge de 14 ans. Le duo passait les nuits à observer les étoiles et les jours à faire des calculs mathématiques. Durant une nuit de novembre 1572, la sœur et le frère ont observé une nouvelle étoile dans le ciel, dans la constellation de Cassiopé. Le phénomène a été visible pendant plus d’un an, période à laquelle ils ont investigué ce nouveau corps céleste. La luminosité de l’objet augmentait autant que le nombre de questions, car, comme se fait-il qu’une étoile bouge alors que les étoiles étaient supposées être fixes?

À l’époque de Sophie Brahe, Galilée n’avait pas encore inventé le télescope (juste en 1609). Mais grâce à l’ingéniosité des Brahes, ils avaient conçu un instrument qui leur a permis de publier un catalogue d’étoiles avec une grande précision. Sophie et Tycho étaient dans les premiers à suivre une méthodologie scientifique. Lorsque Johannes Kepler eut accès à leurs données, il fut en mesure de révolutionner la science avec ses trois lois sur le mouvement des planètes, suivi de la découverte de Isaac Newton et sa théorie de la gravité.

Johannes Hevelius et sa femme Elisabetha observant le ciel (1673). Crédit: Wikipedia

3. Elisabetha Koopman Hevelius, de Pologne

Elisabetha Koopman Hevelius travaillait également chaque jour, et ce, pendant des années, avec son mari Johannes Hevelius, il y a environ 350 ans. Ils ont légué à la science des milliers de calculs qui démontrent la position des étoiles avec leur longitude et latitude. Ce qui est le plus extraordinaire dans leur histoire, c’est qu’ils ont identifié la position exacte de plus de 1500 étoiles, et ce, à l’oeil nu.

4. Caroline Herschel, de l’Allemagne

En 1798, Caroline Herschel, il y a plus de 200 ans, a présenté à la Royal Society des corrections à un catalogue d’étoiles existant ainsi que l’ajout de plus de 500 nouvelles étoiles.

5. Margaret Bryan, de l’Angleterre

Pratiquement la même année, Margaret Bryan publiait un livre destiné à ses élèves du primaire contenant des leçons notamment sur l’astronomie, les lois de Newton, les orbites des planètes, les étoiles et l’Univers.

6. Marie-Jeanne de Lalande, de la France

Marie-Jeanne de Lalande publia quant à elle, les “Tables horaires pour la marine” dans les mêmes années, fruit de ses calculs documentés sur 300 pages et était utilisée pour déterminer le temps en mer grâce à l’altitude du Soleil et des étoiles. Le célèbre astronome Joseph-Jérôme Lalande écrivit à propos d’elle (traduit de l’anglais, p.160) :

« Je crois — écrit Lalande — que ce qui manque aux femmes, ce ne sont que les opportunités d’éducation et les exemples qu’elles peuvent imiter ; on les voit assez se démarquer, malgré les obstacles de l’éducation et des préjugés, pour croire qu’elles ont tout autant de talent que la plupart des hommes qui se font une réputation en Science.”

En 1801, elle avait collaboré au livre “Histoire céleste française” de Lalande, un catalogue d’étoiles de plus de 47 000 étoiles. Pour calculer leurs positions exactes, il faut savoir qu’il y avait trente-six opérations mathématiques par étoile.

7. Les femmes “ordinateurs” de Harvard aux États-Unis

“Pickering’s Harem”, ainsi appelé, pour le groupe de femmes ordinateurs de l’observatoire du Harvard College, qui travaillait pour l’astronome Edward Charles Pickering. Le groupe comprenait l’ordinateur et astronome de Harvard Henrietta Swan Leavitt (1868–1921), Annie Jump Cannon (1863–1941), Williamina Fleming (1857–1911) et Antonia Maury (1866–1952). Crédit: Harvard College Observatory

Dans les années 1890, il y a plus de 130 ans, un groupe de femmes travaillait à la Harvard College Observatory et était nommé les “ordinateurs de Harvard”. Grâce à de petites plaques de verre, 8X10, sur lesquelles des photos astronomiques avaient été prises avec un télescope durant la nuit tenaient plusieurs milliers d’étoiles. Patiemment et méthodiquement, les femmes ordinateurs calculaient à la main, la position de chaque étoile, mesuraient leur brillance relative, étudiaient leur changement en fonction du temps, déterminaient le matériel chimique de leur composition. Leur groupe était le première à réaliser que l’univers est en expansion.

Plaque de verre de la galaxie d’Andromède issue des archives des « ordinateurs » de l’observatoire de Harvard. Crédit: Harvard College Observatory

8. Cecilia Payne-Gaoschkin, de l’Angleterre et des États-Unis

En 1925, Cecilia Payne-Gaoschkin fut la première femme à obtenir un PhD et c’était à la Harvard University, mais une branche de l’université à l’époque dédiée seulement aux femmes. Dans sa thèse, elle démontrait que les étoiles étaient composées principalement d’hydrogène et d’hélium basé sur une démarche scientifique rigoureuse. Des gens de la communauté de l’époque n’étaient pas convaincus de ses résultats. Un autre homme est arrivé un peu plus tard avec les mêmes résultats et l’attribution de la découverte lui a été remise.


Depuis 1919, le catalogue accepté internationalement est publié par l’International Astronomical Union (IAU) qui compte environ 20 000 membres ayant un PHD ou plus, dont 20% de femmes. Les étoiles les plus brillantes portent un nom et les autres plutôt un code. Avec l’historique des recherches depuis des Lunes, les scientifiques gardent la correspondance entre les différents noms utilisés dans différents catalogues pour parler de la même étoile. Par exemple, Bételgeuse est aussi connue comme Alpha Orionis, HR 2061, BD +7 1055, HD 39801, SAO 113271, et PPM 149643. Voir la liste des noms d’étoiles 2021 par IAU.

Notre étoile à nous, c’est le Soleil qui fait partie de notre système solaire. Dans ce système, il n’y a donc pas d’autre étoile. C’est le corps céleste qui brille et qui nous fournit la vie. Les étoiles ne sont pas fixes, nous l’avons su basé sur l’observation des supernovae. Étant d’énormes nuages de gaz, les étoiles se forment avec la gravitation pour devenir une centrale nucléaire, où l’hydrogène est transformé en hélium. Le processus de fusion peut se dérouler sur des milliards d’années. Il y a des étoiles naines, des géantes et des supergéantes, des rouges, blanches, orangées, bleues, selon leur étape de leur vie et donne ainsi leur niveau de luminosité perçu de la Terre. Une blanche, par exemple, n’a plus de combustible à brûler. La voûte céleste qui entoure notre planète est cataloguée en 88 constellations.

Les plus belles étoiles

Par un petit matin d’été, près du 46e parallèle au Québec, j’observe la position des étoiles avec l’application Night Sky. Je pointe ma tablette vers le ciel — et même sous l’horizon, et je peux voir les objets célestes autour de nous.

Recherches d’étoiles avec l’application Night Sky. Crédit: AG

Betelgeuse est une étoile super géante rouge qui, selon les scientifiques, devrait bientôt exploser. Elle est située dans la constellation d’Orion, dans l’épaule du personnage qui représente le fils de Poséidon, dieu de la mer. De la Terre, nous voyons sa lumière 1300 ans après son émission. Rigel, une étoile géante bleue dans un système composé de 4 étoiles, est dans la même constellation, mais plus lumineuse que Bételgeuse. Elle est au genou d’Orion.

Si notre système solaire avait Sirius comme étoile, nous aurions 2 soleils. En effet, Sirius est un système binaire d’étoile: Sirius A et Sirius B. Sirius A est la plus lumineuse des deux étoiles et représente l’étoile la plus lumineuse dans notre ciel nocturne. Le système est tout près de notre soleil — seulement à 8.7 années-lumière. La plus proche étoile de notre étoile est Proxima Centuri et sa lumière arrive à nous en 4.22 années. C’est une petite étoile rouge visible seulement au travers d’un télescope et dans l’hémisphère Sud.

Notre étoile polaire, dans l’hémisphère Nord, est située sur l’axe de rotation de la Terre et facilement repérable, grâce à la célèbre constellation de la Petite Ourse. C’est le point de repère depuis des millénaires pour se repérer. Dans l’hémisphère Sud, il n’y a pas “d’étoile du Sud”, il est donc plus difficile de s’orienter grâce à une étoile “fixe”. Il y a 14 000 ans, Vega était notre étoile polaire! Elle le redeviendra dans plus de 10 000 ans. Vega est une étoile bleue, la 5e la plus lumineuse de notre ciel nocturne. Comparée à notre Soleil, Vega est presque 3 fois plus grosse et est à 25 années-lumière de notre étoile.

Conclusion

De l’Antiquité à aujourd’hui, les femmes et les hommes observent les étoiles, fascinés et avides de comprendre l’univers qui nous entoure. Notre estimation actuelle est sur des milliards et des milliards d’étoiles qui entourent notre système solaire, composé d’une étoile — le Soleil — mais nous savons que nous ne voyons pas encore très loin et que l’Univers est en constante expansion (et à l’infini). Pouvons-nous nous inspirer du fonctionnement des centrales nucléaires des étoiles pour créer de nouvelles technologies pour nos moteurs de fusée? Qu’allons-nous découvrir dans nos prochains voyages d’exploration ou grâce aux dernières technologies?


Référence

Histoires de Enheduanna, Sophie Brahe, Elisabetha Koopman-Hevelius, Caroline Herschel, Margaret Bryan, Marie-Jeanne de Lalande, l’histoire de l’astronomie en Mésopotamie, par les arabes, en Grèce et en Égypte tirées de: “The Unforgotten Sisters, Female Astronomers and Scientists before Caroline Herschel, by Gabriella Bernadi, Springer (2016)”

Curiosités extra-terrestres: observer au-delà de notre atmosphère


Les découvertes à propos de l’Univers grâce au télescope Hubble et sa mère, Dr Nancy Grace Roman, la première NASA’s Chief of Astronomy and Relativity.

Le Dr Nancy Grace Roman, première cheffe de l’astronomie à la NASA, explique l’Observatoire solaire en orbite avancée (AOSO) à l’astronaute Edwin “Buzz” Aldrin en 1965 à Washington, D.C. Crédit: NASA
Buzz était avec Neil Armstrong lors de nos premiers pas sur la Lune en 1969.

Depuis la nuit des temps, nous observons le ciel et ses étoiles pour comprendre d’où nous venons et vers où nous allons. Et le premier enjeu est exactement là: à part le soleil que nous voyons facilement en plein jour, nous sommes voilés par l’atmosphère et les nuages. Nos observations depuis la Terre sont, par définition, physiquement limitées.

Toutefois, étant courageux de travailler durant nos heures normales de sommeil, nous avons été en mesure de découvrir, il y a quelques centaines d’années, que nous vivons dans une galaxie et qu’il y a des planètes et de petits satellites dans notre système solaire, entre autres.

La question fut donc : comment pouvoir observer la galaxie et autres objets inconnus dans l’Univers, sans être gêné par la protection essentielle à notre survie que notre Terre nous offre? Ça prenait un télescope — un gros. Et directement aux premières loges: dans l’espace. En 1946, Splitzer, le père du télescope, publiait son idée comme quoi nous devrions nous doter d’un télescope et le placer au-delà de notre atmosphère. Durant les débuts de la NASA et de l’intérêt des Américains à compétitionner pour l’accès à l’Espace par rapport aux Soviétiques, dans les années 1960, il fallait convaincre les gens ayant le portefeuille de payer une somme astronomique et ainsi, faire avancer la science. Le gouvernement voulait envoyer quelqu’un sur la Lune, mais pourquoi un télescope, se demandaient-ils.

C’est une femme qui a relevé cet exploit. Grâce à sa détermination et son leadership, elle a franchi chaque étape nécessaire pour convaincre le Congrès, débloquer l’argent, réunir des ingénieurs et astronomes talentueux et bâtir le programme à partir de zéro pour faire naître ce qui allait devenir le meilleur télescope au monde.

Dr Nancy Grace Roman est la femme sur la photo à gauche du Président John F. Kennedy. C’était en 1962, lors de la remise du prix Federal Woman’s Award pour leurs contributions extraordinaires au gouvernement.

Dr Nancy Grace Roman à la gauche du Président Kennedy en 1962. Crédit: NASA

Elle est née en 1925 aux États-Unis à l’époque où ce n’était pas bien vu pour une femme de se consacrer aux études supérieures et à la science. Elle était inspirée de son père, un scientifique et de sa mère, qui l’amenait prendre de fabuleuses balades à regarder les constellations. Durant ses études, les encouragements étaient rares et pourtant, elle a persévéré — “Pourquoi une femme étudierait les mathématiques au lieu du Latin?”

Dr Roman fut la première femme ayant décroché un poste exécutif à la NASA et fut nommée Chief of Astronomy and Relativity. Elle est considérée comme la mère du télescope Hubble. Juste après la Deuxième Guerre mondiale, elle obtenait son doctorat de l’Université de Chicago. Elle a fait des découvertes notamment sur la composition des étoiles qui a mené à notre galaxie — la Voie Lactée — en plus de répondre à des questions fondamentales grâce aux ondes radio. Dans une de ses entrevues, elle se remémorait l’époque où elle devait s’assurer de toujours mettre les lettres “Dr” comme préfixe à son nom, sinon elle n’était pas prise au sérieux.

Elle était à la quête de percer les secrets de l’Univers et il fallait pour y arriver, de nouvelles méthodes. Les portes à l’exploration se sont ouvertes à un autre niveau: l’humanité a pu commencer à goûter à la valeur d’un télescope dans l’espace dans les années 90.

Les débuts de Hubble racontés par Dr Roman

Vidéo de la NASA (4 min 30)

Hubble at 25 — The Beginning, by NASA on YouTube

Les exploits de Hubble après 25 ans

Vidéo de la NASA (2 min 30)

Hubble: Voyage of Discovery by NASA on YouTube
2014 Hubble Image of the Pillars of Creation (“Piliers de la création”). Credit: NASA, ESA, and the Hubble Heritage Team (STScI/AURA)
Cat’s Eye Nebula (“Nébuleuse de l’oeil de chat”). Credits: NASA, ESA, and the Hubble Heritage Team (STScI/AURA)
The Sombrero Galaxy (“La Galaxie Sombrero”). Credit: NASA and The Hubble Heritage Team (STScI/AURA)
Ganymede Disappears Behind Jupiter (“Ganymède disparaît derrière Jupiter.”). Credit: NASA, ESA, and E. Karkoschka (University of Arizona)
L’astronaute F. Story Musgrave lors du déploiement de panneaux solaires sur Hubble. Remarquez le bras canadien! Crédit: NASA

Conclusion

Si nos plus vieux ancêtres, comme Homo Erectus, n’avaient pas été curieux de savoir qu’est-ce qu’il y avait l’autre côté de la montagne, nous n’aurions pas peuplé la planète et nous n’aurions pas la vie que nous avons actuellement. Cette force humaine est fascinante: le désir d’explorer. Ce mécanisme est déclenché par la passion et la persévérance et est généralement une résultante d’une nécessité. Dans le cas de nos ancêtres, ils allaient manquer de nourriture. Aujourd’hui, la science est si avancée que nous sommes à l’étape de chercher s’il y a de la vie ailleurs que sur Terre.

Avant 1990, c’était comme si nous observions notre quartier depuis l’intérieur de notre maison, ayant une idée de ce qui nous entoure à l’extérieur grâce à des instruments pouvant être utilisés que dans des conditions spécifiques. Aujourd’hui, tous les livres sur l’astronomie réfèrent aux observations faites par le télescope. Hubble nous a permis de mieux comprendre le cycle des étoiles, la naissance des galaxies, la composition de la matière et notre système solaire, entre autres. Nous sommes mieux équipés pour comprendre ce qui nous est arrivé, qu’est-ce qui peut nous arriver et comment pouvons-nous améliorer la qualité de nos vies, et ce, grâce à de nouvelles technologies.

Et ce n’est que le début.

La prochaine génération du télescope est en développement et portera le nom de Roman Space Telescope, en l’honneur à Dr Nancy Grace Roman pour le télescope Hubble. L’ère de l’exploration extra-terrestre atteindra un autre niveau extraordinaire.


Découvrez des albums photos de Hubble sur Flickr par la NASA.

L’observation du ciel: de l’invention du calendrier au iPhone

Calendrier pour l’agriculture, les étoiles pour la navigation, les temples du Soleil et les téléphones intelligents — l’humain n’a cessé d’innover grâce à l’observation du ciel

Galilée montrant au doge de Venise comment utiliser le télescope, Giuseppe Bertini (1858). Wikipédia

Les observations du ciel à travers les époques nous ont amenés à des inventions extraordinaires. Voici un top 4:

1. Le calendrier

Les peuples avaient besoin d’un outil pour mesurer le temps et planifier diverses activités notamment le soin de leurs terres agricoles en fonction des saisons. Aujourd’hui, il existe plusieurs types de calendriers, mais ils sont tous basés sur la même chose: les observations du ciel et les différents phénomènes naturels cycliques. Certains se fient à la Lune, d’autres au Soleil.

Un calendrier lunaire est basé sur les phases de la Lune pour déterminer le premier jour du mois. Les phases sont en fonction de la position relative du Soleil, de la Terre et de la Lune. L’année a donc 354 jours et les Fêtes n’arrivent pas à la même date d’année en année.

L’application Sky and Moon phases calendar permet de consulter les heures de lever et du coucher du Soleil et de la Lune, dans quel signe du zodiaque est la Lune et quand sera la prochaine nouvelle Lune. Crédit capture à partir d’un iPhone: AG.

Le calendrier le plus connu et utilisé au monde est le Grégorien datant de 1582 par le Pape Grégoire XIII. Celui-ci se base sur le Soleil et contient 365 jours. Noël arrive toujours le 25 décembre de chaque année.

2. Un système GPS naturel

Le Soleil ou la Lune nous permet donc de mesurer la cadence de nos vies. Les étoiles sont toutes aussi importantes. Nos ancêtres s’en servaient pour se repérer en nature. C’était leur GPS (Global Positioning System). De nos jours, ce sont les satellites qui nous transmettent l’information pour s’orienter.

Pour s’aider à mémoriser les étoiles et ainsi connaître leur position géographique sur Terre, l’espèce humaine a démontré une imagination fantastique. Nous avons regroupé des étoiles en constellations et tracé des silhouettes extraordinaires associées à des légendes. Ainsi, il était possible de transmettre le savoir de générations à générations en racontant des histoires.

Si la Lune exerce une influence significative sur la planète notamment pour les marées vu la force gravitationnelle, les gens se sont toujours demandé le rapport d’influence des astres sur nous-mêmes. C’est ainsi qu’est née l’astrologie il y a plus de 4000 ans. Étant donné qu’il n’y a pas de preuves scientifiques, la majorité des gens ne le prend pas au sérieux. Ceci dit, dans notre culture populaire, il n’est pas rare qu’on remarque la différence entre une personne, par exemple, de signe astrologique Poisson et une autre Taureau. En somme, douze constellations tracées par notre imagination formant un anneau de 360 degrés sur l’orbite terrestre représentent chaque signe du zodiaque. Les vieilles cartes de l’Univers démontrent régulièrement ces signes dans le ciel et servent toujours de guide.

Pour en savoir davantage sur l’histoire de l’astrologie, je recommande “La tentation de l’astrologie” (FR) / “The Secrets of the Vaulted Sky: Astrology and the Art of Prediction“ (EN), de David Berlinski.

Les signes astrologiques autour de nous. Crédit: Astronomytrek.

3. De l’ingénierie

Des civilisations malheureusement disparues nous ont fait l’immense honneur de nous léguer des sites extraordinaires dédiés, selon plusieurs archéologues et historiens, aux observations astronomiques. J’en ai visité deux: Stonehenge en Grande-Bretagne et le Machu Picchu au Pérou. Ces sites sont considérés aujourd’hui comme un héritage inestimable de nos ancêtres, un exploit d’ingénierie en plus d’être dotés d’un côté mystique et spirituel. On dit que les peuples anciens s’en servaient, entre autres, pour observer des phénomènes astronomiques, telles que les éclipses et la position du Soleil, notamment pour prévoir le solstice d’été et d’hiver.

Machu Picchu, par les Incas, XVe siècle. Crédit: AG (2011)
Stonehenge, probablement par les autochtones, il y a plus de 4500 ans. Crédit: AG (2009)

Visitez virtuellement et gratuitement Stonehenge grâce au site internet Skyscape. Commencez par cliquer en bas à droite sur le bouton “Skyscape” afin de voir la position des planètes et du soleil, entre autres. Ensuite, en haut de l’écran, cliquez sur les petits carrés qui représentent différentes heures de la journée. Comme dans un jeu vidéo, cliquez-glissez sur l’image pour observer aux alentours.

Capture d’écran du site Stonehenge Skyscape par English Heritage. Crédit capture: AG.

Mon séjour à Prague m’a inévitablement amené à contempler son horloge astronomique, un magnifique astrolabe médiéval créé en 1410. Elle indique notamment la position du Soleil et de la Lune ainsi que les signes astrologiques. En premier plan, aux couleurs bleue et orange, c’est la Terre et la lumière du Soleil. Le deuxième plan avec le zodiaque se déplace selon le temps. Construite plus de 100 ans avant la publication de Nicolas Copernic et le modèle héliocentrique (1543), l’horloge de Prague propose le modèle géocentrique, c’est-à-dire que la Terre est au centre de l’univers, comme le disait Ptolémée. Son système était accepté depuis 1400 ans.

Horloge astronomique de Prague, XIVe siècle. Crédit: AG (2008)

4. Des connaissances sur l’Univers accessibles à tout le monde

En 1609, Galilée avait inventé sa lunette pour observer le ciel et révolutionner nos connaissances. Aujourd’hui, la quasi-majorité de la population tient dans le fond de leur poche un petit ordinateur capable de les accompagner pour observer le ciel, et ce, grâce à une connexion Internet. Prenez, par exemple, la version gratuite de l’application Night Sky.

  • C’est le type d’outil “pointer-voyer”: de pointer le ciel et voir les objets célestes apparaître avec leurs informations. On voyage dans l’Univers depuis le confort de notre salon.
  • Zoomer pour voir encore plus loin dans les étoiles.
  • Rechercher des satellites, des étoiles, des planètes et laisser le soin à l’application de vous montrer où est actuellement cet objet dans l’Univers.
  • Profiter de la réalité augmentée pour observer les figures fantastiques dans le ciel qui permettait à nos ancêtres de s’orienter grâce aux étoiles.
  • Et pourquoi pas, faites de l’astrophotographie!
L’application Night Sky en action. Crédit capture à partir d’un iPad: AG.

Conclusion

L’observation du ciel a fertilisé notre imagination depuis la nuit des temps et nous a poussés à créer sur Terre des choses extraordinaires. Pour pouvoir mesurer le temps et prédire les prochaines saisons, nous avons inventé le calendrier. Basés sur la position des étoiles, nous avons imaginé des silhouettes fantastiques dans le ciel et les avons associées à des légendes. Les histoires racontées nous aidaient à nous bâtir mentalement une carte du ciel, ce qui nous permettait de nous géolocaliser en naviguant. Au fil des siècles, nous avons bâti des sites extraordinaires qui relèvent d’exploits d’ingénieries. Certains d’entre eux comportent des éléments spécifiques pour suivre l’Univers qui nous entoure et mesurer le temps grâce au Soleil. Finalement, l’accessibilité aux connaissances sur l’Univers est maintenant possible pour tous grâce à l’Internet et aux téléphones intelligents.


Autres références

La NASA célèbre les 50 ans du programme Apollo

Visite guidée sur le site de lancement historique des missions sur la Lune

Logo de la NASA à l’entrée du Kennedy Space Center, Floride. Crédit: Anne Gauthier

En arrivant au Kennedy Space Center, sur le site de la NASA à Cape Canaveral (Floride), vous allez embarquer dans un autobus privé qui vous conduira à un des musées d’art et d’ingénierie les plus iconiques de l’histoire de l’humanité. Grandeur nature.

Dans une salle sombre, soudain s’ouvriront des écrans d’une autre époque. Une lumière bleutée vous permettra de voir des dizaines de vieux ordinaires, soudés l’un à l’autre comme un énorme tableau de bord. Le président des États-Unis John F. Kennedy sera vivant sur l’écran central.

Reproduction de la salle de contrôle du programme Apollo, Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier

Vous allez revivre le lancement de la mission d’Apollo qui permit, en 1969, aux astronautes Neil Armstrong et Buzz Aldrin, de marcher sur la Lune. Ils seront les premiers sur 12 au total jusqu’en 1972.

Après ce voyage dans le temps, vous n’avez rien vu encore.

Vous serez invités à suivre un corridor qui vous amènera à un hangar. Et c’est à ce moment que vous allez réaliser l’exploit technologique nécessaire pour assouvir notre soif d’exploration extra-terrestre.

Elle repose là, accrochée à l’infrastructure. Le bleu du hangar vous rappelle le ciel. Le premier regard est éparpillé, car plusieurs couleurs vives attirent votre attention. En reprenant vos esprits, après quelques dizaines de secondes, vous remarquez les cinq moteurs F-1 de Rocketdyne pouvant produire 7.5 millions de livres de poussée. Ils sont juste au-dessus de votre tête. Chaque moteur mesure 19 X 12 pieds et pèse plus de 18 000 livres. Ils brûlent du kérosène et de l’oxygène liquide.

Votre cou est dans une posture perpendiculaire à vos corps et vous faites quelques pas sous l’énorme pièce. Vous réalisez maintenant que c’est la fusée Saturn V qui a rendu possible le programme Apollo. La fusée s’étend sur 363 pieds. C’est comme un immeuble de 36 étages sur l’horizontale flotte devant vos yeux.

Étape 1 de la fusée Saturn V et les cinq moteurs F-1. Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier

Ces moteurs ultra-puissants n’étaient que l’étape 1 de 3 dans l’ascension. En effet, pour amener les astronautes sur la Lune, il y a différentes étapes techniques à franchir et donc la fusée Saturn V a trois sections: les S-IC, S-II et S-IVB. Ces sections se détachent de la fusée à des moments précis. Chaque énorme compartiment tombera éventuellement dans l’océan Atlantique à différentes distances du site de lancement. Les équipes sur Terre tenteront de les retrouver, mais ils n’y parviendront pas toujours.

L’étape 1 se déclenche avec les cinq moteurs F-1 à feu. La fusée commence à peine à se soulever de la Terre. Selon les scientifiques, le bruit provoqué par le lancement d’Apollo est un des plus intenses jamais enregistrés, autant par l’humain que par la nature. Les vibrations se font ressentir à plusieurs kilomètres à la ronde. Cette étape est responsable d’amener la fusée à 61 kilomètres de la Terre, en 2.5 minutes. Les astronautes subissent une très grande force gravitationnelle qui les écrase dans leur capsule.

L’étape 2 possède cinq autres moteurs de modèle J-2. Ceux-ci brûlent de l’hydrogène liquide ainsi que de l’oxygène liquide. En 6 minutes, la fusée peut maintenant atteindre une altitude de 185 km avec une vitesse de plus de 24 000 km/h.

Étape 2 de la fusée Saturn V et les cinq moteurs J-2. Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier

Finalement, l’étape 3 est divisée en deux temps et elle possède un seul moteur J-2. L’objectif est d’amener la fusée en orbite terrestre basse. À ce moment, le vaisseau spatial est toujours attaché à l’étape 3 (S-IVB) et ils éteignent le moteur. Les astronautes tournent autour de la Terre le temps de vérifier si les systèmes sont bien fonctionnels avant de partir vers la Lune. Quand tout est prêt, ils déclenchent le Trans Lunar Injection qui permet de redémarrer le moteur, et fuir la gravité terrestre collante à plus de 38 000 km/h.

Étape 3 de la fusée Saturn V et le moteur J-2. Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier

Accroché à l’étape 3 de Saturn V, il y a les ordinateurs dans l’Instrument Unit. Cette bague gigantesque est extraordinaire pour l’époque. C’est la compagnie International Business Machines (IBM) qui a conçu cette portion avec les plans de conception des ingénieurs de la NASA. Le cerveau de la fusée a 21 pieds de diamètre et pèse approximativement 4 000 livres. Grâce aux calculs, l’unité permettait de déterminer quand allumer les moteurs, mesurer l’altitude, l’accélération, la vélocité, la position, l’état de santé des moteurs et plus encore.

Instrument Unit (les ordinateurs) de la fusée Saturn V. Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier

Le voyage n’est pas encore terminé. Le Command and Service Module (CSM) se sépare de l’étape 3. Le pilote doit conduire Columbia vers le module lunaire Eagle. Finalement, “The Eagle has landed…” Les astronautes sont arrivés sur la Lune.

Module lunaire Eagle. Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier
Vue de la fusée Saturn V dans son ensemble incluant le vaisseau spatial plus bas. Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier

La fusée Saturn V fut assemblée dans l’iconique bâtisse nommée VAB (Vehicle Assembly Building). Il y a 4 portes comme un garage, chacune faisant 456 pieds. Il faut compter 45 minutes pour les ouvrir ou les fermer.

Bâtisse (VAB) où la fusée Saturn V fut assemblée. À gauche, une tour ombilicale. Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier

La fusée Saturn V est ensuite transportée sur un transporteur à chenilles colossal, pesant 6 millions de tonnes, du VAB au site de lancement. Le parcours dure toute la journée tellement il doit se déplacer lentement pour éviter toute catastrophe.

Crawler. Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier

À l’époque du programme d’Apollo, le contexte politique était différent d’aujourd’hui. C’était la guerre froide avec l’Union soviétique. Youri Gagarine, un Soviétique, fut le premier homme dans l’espace, et ce, en 1961. Kennedy avait donné la décennie (#délaitrèscourt) pour que les Américains reprennent la première place dans la course vers la Lune.

Quelques années après les succès d’Apollo, le programme fut dissous par manque d’argent. Les politiques avaient changé, les priorités du budget aussi. La NASA proposait de grands programmes, comme aller sur Mars, mais le Congrès n’était pas convaincu.

Aujourd’hui, des compagnies privées de milliardaires prennent position. Dont SpaceX avec Elon Musk. Le modèle d’affaires a donc changé: ce n’est plus gouvernemental seulement, mais un partenariat avec le privé. De toute façon, la NASA ne pouvait plus fournir seule les sommes astronomiques pour rendre possibles les missions de recherche et d’exploration.

SpaceX d’Elon Musk sur le site de la NASA. Kennedy Space Center. Crédit: Anne Gauthier

Excellente nouvelle: la NASA a dernièrement annoncé un nouveau programme: Artemis — la sœur jumelle d’Apollo. Grâce à l’association de la NASA avec plusieurs agences spatiales internationales, dont le Canada, et un partenariat avec des compagnies privées, Artemis va repousser des humains sur la Lune. Dont une femme.

L’objectif de rester sur la Lune et l’utiliser comme étape pour aller vers Mars.


Autres références

12 théories sur l’Univers expliquées par Stephen Hawking

Pour mieux comprendre d’où on vient

Photo by Chinh Le Duc on Unsplash

Stephen Hawking, prisonnier à l’intérieur d’un corps ravagé par la maladie, doté d’une capacité intellectuelle digne des plus grands savants, il souriait, passionné de partager avec le grand public des réponses aux questions qui nous animent tous. Des questions simples aux réponses très complexes basées sur des siècles de recherches.

L’Univers est âgé de 13,8 milliards d’années et pourtant, ce n’est que depuis 60 000 ans que l’humain a commencé à explorer en dehors du continent africain et il n’y a que 52 ans que le premier humain marchait sur la Lune. Le goût à l’exploration est dû au fait que nous avons eu l’honneur d’être neurologiquement équipés de la curiosité intellectuelle au cours de notre évolution, ce qui nous pousse à aller voir là-bas. Le mode d’apprentissage est une constante, mais plus on en sait, plus on se rend compte qu’on ne sait rien — comme le disait Socrate, le grand philosophe de la Grèce antique. Tout commence par une question: “pourquoi?” et ensuite c’est une succession de boîtes aux trésors. Ces petites boîtes donnent un sens à notre vie.

Dr Hawking, d’origine anglaise (1942–2018), était physicien théoricien et cosmologiste, pour tenter de résumer sommairement ses multiples champs d’expertise. Il a ouvert de très grandes boîtes, telles que la compréhension de l’Univers et les trous noirs. Sa quête, comme celle de ses collègues fut d’unifier la Relativité générale et la Mécanique quantique pour ainsi avoir une théorie pour décrire l’Univers. Noble comme aventure, n’est-ce pas?

La Royal Society est une communauté qui regroupe les plus grands scientifiques. De notre génération, Stephen Hawking a été élu “Fellow of the Royal Society”. Il y a 300 ans, ce type de position était occupée par nul autre que Isaac Newton. La révolution de Newton mettait la lumière sur une force invisible, inodore et intouchable, mais qui pourtant gouverne tout jusqu’au fin fond infini de l’Univers: la gravité.

Le travail de recherche durant la carrière de Stephen Hawking est phénoménal. L’image que je me fais est celle d’un homme qui ne fait pas du 9 à 5. Mais plutôt vivant dans un processus sans fin, dans lequel justement l’immensité de la tâche le pousse à continuer avec courage et détermination. C’est la curiosité à l’état pur. Pourquoi s’arrêter quand on est à une étape d’un savoir, d’une découverte ou simplement une petite clé qui ouvre la porte vers un monde inconnu? La force qui nous pousse à connaître ce qu’il y a l’autre côté du mur est innée, instinctive et universelle. À l’échelle du cosmos, ce n’est pas l’envie qui doit manquer de savoir d’où on vient. Il a eu aussi beaucoup de confiance pour faire face à l’inconnu et surtout aux limites des connaissances humaines.

Imagination is more important than knowledge. — Albert Einstein

Et pourtant, son bagage de connaissances est si vaste: la physique, biologie, astronomie, cosmologie, mathématiques, etc. Beaucoup de gens ont de la difficulté à suivre des cours d’introduction à l’école sur ces matières, alors qu‘il a écrit l’histoire et a fait avancer la science et notre compréhension du monde dans lequel on vit. Et tout ça, je le rappelle, enchaîné à un fauteuil roulant.

Socrate, Platon et Aristote sont du temps de la Grèce antique, il y a en somme entre 2000 et 2500 ans. Ils étaient des philosophes et défiaient les statu quo. Le mot “philosophie” vient de deux mots grecs: Philos et Sophia. Cela signifie “l’amour de la sagesse”. Ces personnages historiques utilisaient une technologie très moderne (la raison humaine) pour déterminer ce qui est vrai par rapport au faux, et ce, suivant une démarche rigoureuse. Est-ce que quelque chose est vrai basé sur ce que nos sens ont capté ou sur ce que nous avons entendu dire? Plutôt, les philosophes étudiaient les hypothèses, et surtout vérifiaient si c’était la bonne question qui était posée. Sans quoi, la conclusion ne pourrait pas être vraie, elle serait considérée invalide.

Le mécanisme ressemble aux méthodes scientifiques d’aujourd’hui. Et Stephen Hawking était de cette espèce. Cependant, il y a une grande différence entre celui considéré comme le fondateur de la philosophie occidentale, Socrate et un des plus grands génies de notre époque, Stephen Hawking: ce dernier nous a offert le privilège de nous laisser en héritage ses textes avec ses propres mots. Le problème avec Socrates c’est qu’il n’a laissé aucune mémoire écrite. Tous “ses mots” sont en réalité une perception et une interprétation de ses successeurs. On ne peut donc pas savoir avec certitude les théories réellement formulées par le Grec.

Malgré tout, ils partageaient la même définition de la science: créer un modèle qui permet de prédire le futur (et le passé), peu importe qui l’exécute. Pour Hawking, c’était de décrire l’Univers et donc notre histoire. Dans son célèbre livre “La brève histoire du temps”, Stephen Hawking nous dresse un portrait sur l’histoire des théories vis-à-vis l’Univers, et ce, à différentes époques.

Voici donc la synthèse de 12 théories sur l’Univers en ordre chronologique.

1. Le mythe de la Terre plate

C’est humain et réconfortant d’imaginer que l’Univers est éternel et ne change pas.

Gravure de Flammarion pour son livre “l’Astronomie populaire” édité en 1880. Universum

2. La Terre est ronde

Il y a plus de 2300 ans — Aristote, philosophe grec. Il prouve que la Terre est ronde en observant les éclipses de Lune et l’étoile Polaire selon la position géographique d’un observateur sur Terre. Il a calculé la circonférence de notre planète, il pense qu’il n’y a pas eu d’intervention divine dans la création de l’Univers et croit que les catastrophes naturelles calibrent la race humaine.

Cosmographie de Petrus Apianus (1581) Démonstration que la Terre est ronde — Crédit : Bibliothèque de l’Observatoire de Paris

3. L’Univers a été créé par Dieu

Depuis plus de 2000 ans — Église chrétienne. L’Univers a été créé par Dieu 5000 ans avant Jésus-Christ. La Terre est au centre de l’Univers et il y a le paradis et l’enfer. Si quelqu’un propose un système cosmologique non approuvé selon les Saintes Écritures, la personne sera accusée et punie.

The Garden of Earthly Delights, par Bosch — Le paradis et l’enfer

4. Le géocentrisme

Il y a plus de 1900 ans — Ptolémée, astronome, géographe et mathématicien grec, propose un système cosmologique géocentrique et le décrit dans son livre Almageste. La Terre est le centre de l’Univers, elle est immobile et sphérique. L’Univers est fini avec des frontières. Les orbites sont des cercles et les étoiles sont fixes.

Ptolemy’s geocentric model in Peter Apian’s Cosmographia, 1524

5. L’héliocentrisme

Il y a 500 ans, en 1514 — Nicolas Copernic (il avait d’abord publié ses premières idées anonymement par peur de l’Église), prêtre polonais, mathématicien et astronome. Le Soleil est le centre de l’Univers et les planètes gravitent autour de celui-ci qui est immobile. Les planètes tournent sur un cercle.

L’idée de Copernic n’a pas été prise au sérieux pendant 100 ans.

Heliocentric model in Copernicus’ manuscript — On the Revolutions of the Heavenly Spheres

6. Astronomie moderne

Il y a 400 ans, en 1609 — Kepler, astronome et mathématicien allemand et Galilée, astronome et mathématicien italien, confirment la théorie de Copernic. Galilée a inventé le télescope pour observer le ciel. Les planètes tournent sur une ellipse.

Capture d’écran de mon iPhone grâce à l’application de la NASA qui permet en temps réel d’explorer le système solaire. C’est bien le modèle calculé et observé par ces grands savants.

7. La gravité universelle

Il y a 300 ans, en 1687 — Newton, mathématicien, physicien et astronome anglais. L’Univers est infini, les étoiles s’attirent entre elles par la force de la gravité, comme les forces entre les planètes et le Soleil. Newton décrit le mouvement des corps dans l’espace et le temps grâce aux mathématiques.

En analysant les étoiles, ils se demandent si elles pourraient tomber en un point. Selon ses calculs, c’est impossible, car dans un Univers infini il n’y a pas de point central. Il calcule la force de gravité (F) entre deux corps grâce à une constante de gravité (G), la masse des deux objets (m1 et m2) et la distance entre les deux centres (r).

Deux captures d’écran de l’application mobile Solar Walk Ads+ de Vito Technology. Les étoiles et les planètes sont soumises aux forces de la gravité.

8. La lumière des étoiles

Il y a 200 ans, en 1823 — Heinrich Olbers, philosophe allemand. Pourquoi le ciel est-il noir la nuit? Si les étoiles brillaient toutes en même temps, comme le Soleil, le ciel ne serait pas aussi sombre. La raison est que l’Univers est en constante expansion, les étoiles finissent par s’éteindre, mais sur Terre, leur lumière nous arrive avec un grand décalage de temps.

Photo by Nick Owuor (astro.nic.visuals) on Unsplash

9. La théorie de l’évolution par la sélection naturelle

Il y a 160 ans, en 1859 — Charles Darwin, naturaliste anglais. Pour survivre, une espèce est en changement et s’adapte au nouvel environnement, étant donné que les ressources sont limitées sur Terre.

L’évolution du crâne humain. Wikipedia

10. La théorie de la relativité générale

Il y a 100 ans, en 1915 — Einstein, physicien allemand, publie la théorie de la relativité générale en englobant la théorie de la gravitation de Newton. L’espace-temps, représenté dans l’image ci-dessous par le quadrillage, est déformé par l’énergie de la Terre. La théorie d’Einstein prédit, entre autres, les trous noirs et stipule que rien ne peut dépasser la vitesse de la lumière.

Distorsion de l’espace-temps. Wikipedia

11. Il n’y a pas qu’une galaxie

Il y a 90 ans, en 1929 — Edwin Hubble, astronome américain, observe qu’il y a beaucoup d’autres galaxies autour de nous, à l’extérieur de la Voie lactée et elles s’éloignent à grande vitesse dans l’Univers infini. Un jour, l’Univers a donc dû être très petit et dense, ce qui aurait causé le Big Bang, il y a 13,8 milliards d’années.

Une vue de plusieurs galaxies autour de la Voie lactée. NASA, Wikipedia

12. Les trous noirs

Depuis les 60 dernières années, un des plus grands exploits après la théorie d’Einstein, c’est une meilleure compréhension des trous noirs. Stephen Hawking et Robert Penrose font partie des pionniers sur le sujet. Malheureusement, Hawking n’a pas pu partager le Prix Nobel de 2020 avec Penrose, car il a quitté ce monde en 2018.

L’Univers est en effet infini, mais chaque point devient un ensemble fini ayant un centre avec un nombre infini d’étoiles autour. Les étoiles tombent donc en ce point, créant les trous noirs. La gravité est si forte que même la lumière ne peut s’y échapper.

Simulation d’un trou noir. Wikipedia

Conclusion

La quête de la théorie unifiée est complexe. La théorie de la relativité générale semble incompatible avec la mécanique quantique. La première traite des phénomènes à très grande échelle alors que la seconde traite de phénomènes de très petite échelle. Les scientifiques cherchent la théorie de la gravité quantique.

Après tant de générations, comment se fait-il que nous n’ayons pas déjà déchiffré l’énigme de l’Univers? Selon Hawking, il s’agirait d’une conséquence directe avec la théorie de Darwin: notre espèce n’est peut-être pas encore conçue pour connaître ses réponses. Est-ce que ça pourrait impacter notre survie? Sommes-nous prisonniers de notre imagination et de nos perceptions? L’histoire de nos ancêtres pourrait expliquer notre réalité: on évolue, on s’adapte à notre nouvel environnement, et ce, pour survivre. Nos avancées technologiques sont peut-être une solution pour notre survie et ainsi amener notre civilisation sur une autre planète, pour les mêmes raisons qui ont poussé nos ancêtres à se déplacer: forte population, nourriture manquante…


Pour découvrir Stephen Hawking, son livre publié au milieu des années 80, “La brève histoire du temps, les grandes théories du cosmos du big bang aux trous noirs” est à lire absolument, pour les curieux de nature. Lien vers Renaud Bray pour obtenir le livre